Catégorie : Education

  • Le désir d’aider avec Dilingco

    Dilingco est une société plurielle : jeux sérieux pour apprendre avec le numérique, offre de formation et d’auto-formation, édition d’ouvrages papier ou en ligne, etc. C’est un exemple typique d’entreprise du XXIème siècle fondée avec une volonté de partage et des valeurs éthiques. Partons à sa découverte en donnant la parole à Alain Rochedy, son président.

    Vous publiez sur le web des jeux sérieux et des modules de formation. Mais qu’est ce qu’un jeu sérieux pour vous ?

    ©avansteduc.com

    Nos jeux sérieux déroulent des pages qui présentent de manière ludique, décalée et pédagogique les divers aspects d’un thème, sous forme de contenus attrayants et de pages courtes adaptées à la navigation Internet. Ces jeux sont sérieux par leurs aspects instructifs, ou par ce qu’ils mettent en valeur des activités, en lien avec l’économie d’une région.

    Par ces temps de confinements et de grandes souffrances économiques, cette fonction de promotion régionale est plus que sérieuse : vitale.

    D’où vous est venu le besoin de faire un tel site Internet ?

    Notre site est né du besoin de mise en ligne de documents de cours pour aller vers la publication de contenus interactifs : ces jeux sérieux et un calculateur pédagogique virtuel.

    Au delà du contenu, ce site concrétise un rêve, celui de créer un groupe de passionnés qui développent des produits à hautes valeurs sociétales.

    Pour réaliser des jeux sérieux orientés tourisme, savoir-faire, sport, ou œnologie, on mêle la recherche et la synthèse documentaire, la rédaction de textes et la création de figures.

    Comment s’utilisent ces jeux sérieux ?

    Nos jeux sérieux, bien qu’accessibles par le catalogue de notre site, ont vocation à être utilisés directement sur un site partenaire. L’entreprise ou l’organisme partenaire configure dans son site Internet un bouton qui ouvre le jeu configuré sans afficher de page propre à notre site. L’intégration du jeu dans le site partenaire est optimale, l’utilisateur n’a pas à choisir un jeu dans le catalogue Avansteduc et il revient automatiquement au site partenaire une fois le jeu terminé.

    ©avansteduc.com

    Le jeu « Massif de la Chartreuse »est représentatif de cette complémentarité, ouvrons le ensemble pour voir. C’est un exemple de jeu, décalé, ludique, captivant, non lié à des présentations purement touristiques, et complémentaire des contenus des offices régionaux de tourisme.

    On pourra aussi expérimenter le  «  Jeu Valence Romans Agglo »., pour mieux se rendre compte.

    Une personne qui navigue sur internet passe en moyenne quelques minutes par site visité, mais plusieurs dizaines de minutes sur nos jeux sérieux.

    C’est une forme d’addiction aux jeux ? 

    Non. C’est tout simplement un comportement différent lié à l’aspect ludique, qui permet de prendre son temps, se poser, et satisfaire sa soif de connaissances 🙂

    Vous proposez aussi des modules d’initiation à l’informatique ?

    Les sections “Comprendre le numérique” et le “Calculateur pédagogique” sont complémentaires et ont pour but de faire comprendre le fonctionnement d’un ordinateur de l’intérieur, dans ses entrailles électroniques, mais sans les lourdeurs d’une présentation trop technique.

    Le premier se focalise sur la connaissance et résume sous forme d’un jeu une série d’éléments de base. On commence par  lister les pages pour s’imprégner du sujet avant de passer au jeu, qui implique réellement l’utilisateur, vérifie ses réponses, et contrôle sa progression page à page suivant ses acquis.

    Le calculateur pédagogique complète comprendre le numérique par des travaux pratiques. Les travaux pratiques sont divisés en études progressives, où seules les cartes électroniques concernées sont visualisées et accessibles, puis en études globales où les six cartes électroniques du calculateur sont présentes. Le calculateur exécute alors  un programme « clignotement de LEDs ». Le calculateur peut alors s’utiliser en mode automatique, pas à pas, ou même en dépannages virtuels.

    Le parti pris est de faire le plus simple possible mais avec la réalisation d’un vrai calculateur qui permette de comprendre le fonctionnement global d’un ordinateur avec ses interactions entre matériels et logiciels. Les composants électroniques ne sont détaillés au niveau physique mais au niveau logique : stockage des instructions et des variables, exécution des instructions, réalisation de tests, cadencement des opérations, etc.

    Avec sa carte d’entrées/sorties 8 boutons 8 LEDs, ses petites cartes mémoires et son unité arithmétique simplifiée, ses 8 instructions de base et son unique programme de clignotement de LEDs, le calculateur offre une simplicité optimale pour obtenir un calculateur le plus pédagogique du monde. Quelques composants de plus en ferait un calculateur réel.

    Quel lien avec les nouveaux enseignements d’informatique au lycée ?

    Le point clé est de pouvoir incarner et rendre tangible les connaissances théoriques par une compréhension plus pratique et plus globale. À la marge des programmes actuels, on peut ainsi expliquer avec enthousiasme le binaire, présenter la fonctionnalité d’un composant logique, et le fonctionnement global d’un ordinateur simplifié.

    On pourra même faire du dépannage virtuel après les autres travaux pratiques, ce qui permet la synthèse des connaissances et la sensibilisation des démarches de résolution de problèmes.

    Cela concerne l’enseignement NSI de spécialité informatique de première et terminale, l’enseignement supérieur (IUT,BTS, …), et la formation professionnelle (AFPA, CUEFA, CFA, CND, …),  ressources annexes complémentaires ou pivot central de certaines parties du programme, mais aussi outil de révision, ou d’évaluation.

    Comment s’est faite l’évaluation des modules informatiques ?

    Nous nous sommes adressés à des Ministères, à des organismes publics de formation, à des lycées préparatoires aux grandes école et à des lycées professionnels. Nous avons un partenariat avec https://aconit.org, le conservatoire français de l’informatique et de la télématique, dont les publications et ses collections sont beaucoup visitées par les professeurs, qui ont relu et corrigé nos contenus.

    Ces évaluations permettent de situer les outils par rapport aux niveaux des élèves et par rapport aux programmes, de détecter les améliorations et modifications à apporter, de mesurer l’impact des lignes réseaux.

    Comment allez vous faire pour améliorer le référencement de votre site ?

    Faire arriver nos jeux dans la page de tête des moteurs de recherche passe par la multiplication des jeux et par l’utilisation maximale des techniques de référencement.

    En 2021 nous publierons les jeux Bordeaux au cours des siècles, Nantes, Vannes, Le Nord, Alsace, et Côte d’Azur.

    Nous rêvons d’un futur où la notoriété du site sera suffisante pour inciter les responsables de sites institutionnels à nous demander la réalisation de jeux sérieux.

    Quel est le modèle économique ?

    Les jeux sérieux et les modules Informatique sont en accès et en utilisation libres : nous voulons faire du calculateur pédagogique un blockbuster utilisé de facto dans l’enseignement. C’est l’explosion du nombre d’accès dans ce domaine qui va rejaillir  sur tous nos jeux sérieux et sur la notoriété de notre site.

    Des visuels publicitaires sont placés dans la colonne de droite de certaines pages des jeux sérieux. Les revenus engendrés devraient rapidement nous permettre d’atteindre un niveau d’équilibre pour accompagner notre développement. Merci aux sociétés qui dès à présent nous font confiance par leurs présences dans nos pages !

    La société Dilingco est riche de ses produits et des expériences acquises. Ses produits en accès libres évoluent dans le monde du numérique en ligne, ils sont originaux et ils répondent à des besoins forts de mobilité virtuelle, de divertissement et d’éducation en ligne. Parmi ces produits une pépite, le calculateur pédagogique.

    En cette période Covid il y a urgence de faire connaître les produits Avansteduc aux utilisateurs concernés. Des associations, des établissements publics individuels, des personnes clairvoyantes et engagées vont l’y aider.

    Espérons que binaire vous aidera aussi à vous faire connaitre…

    Thierry Viéville, Inria, interroge Alain Rochedy <alain.rochedy@dilingco.com> https://www.avansteduc.com

    Note des éditeurs : Alain Rochedy n’est pas un « copain » et binaire ne reçoit rien en échange de cet article. C’est seulement que nous partageons les valeurs avancées.

  • Éducation et la diversité de l’informatique à l’école

     Télétravail,  visioconférence, école à la maison, et  classes virtuelles pendant le confinement.  Nous avons tous eu besoin de faire appel aux outils numériques, avons-nous eu la culture nécessaire pour affronter la situation? Quelle est la mission de l’école par rapport à l’informatique dans le monde d’aujourd’hui?

    Jean-Pierre Archambault,  président de l’association Enseignement Public et Informatique (EPI), nous parle -dans un texte extrait de la revue Terminal– de l’informatique à l’école, son importance, les différents approches pédagogiques et son histoire en France. Tamara Rezk

    Le paysage de l’informatique et des TIC éducatives s’est transformé d’une manière notable à la rentrée scolaire 2012 avec la création en Terminale S d’un enseignement de spécialité « Informatique et Sciences du numérique » . L’informatique est ainsi (re)devenue une discipline scolaire d’enseignement général au lycée, un statut qu’elle avait perdu. C’est important car l’expérience des années 1980 et 1990 avait montré que l’informatique « objet d’enseignement » et l’informatique « outil pédagogique » étaient complémentaires et se renforçaient mutuellement. L’informatique est à la fois un élément de la culture générale scientifique scolaire au XXIème siècle et un instrument qui, bien utilisé, enrichit la panoplie pédagogique des enseignants.
    En France, à l’instar de ce que l’on a pu constater notamment dans un certain nombre de pays européens, la discipline informatique a connu sur la durée une émergence chaotique, avec des avancées et des reculs, un mouvement de balancier. Dans les années 1980 et 1990, il y avait dans les lycées une option informatique d’enseignement général qui donnait satisfaction. Ce qui n’a pas empêché qu’on la supprime, pour de mauvaises raisons, une première fois en 1992 (alors qu’elle était en voie de généralisation) et une seconde fois en 1998 après qu’elle eut été rétablie en 1995.
    Crédits : Compassionate Eye Foundation/Chris Ryan – Getty
    Selon une première approche pédagogique, les apprentissages doivent se faire exclusivement à travers les usages de l’outil informatique dans les différentes matières scolaires existantes : pas de discipline informatique. Une autre approche pédagogique existe pour laquelle, l’informatique étant partout, elle doit être quelque part en particulier, à un moment donné, sous la forme d’une discipline scolaire en tant que telle. Pour les uns, l’utilisation des TIC suffit. Pour les autres, l’utilisation d’un outil, matériel, logiciel, conceptuel, ne suffit pas pour le maîtriser.
    Correspondant à l’approche par les seules utilisations, le « B2i » a vu le jour en 2001. Il s’est révélé être un échec. Cet échec était prévisible : imaginons que l’on supprime le cours de mathématiques et qu’on décide de traiter les entiers relatifs en histoire, à l’occasion de l’étude de la période avant-après J.-C., ou encore les coordonnées en géographie quand on parle de longitude et de latitude. Cela ne fonctionnerait évidemment pas. Pourtant, c’est ce que l’on a fait avec l’informatique.

    Depuis longtemps, d’une manière générale, nous savons qu’il est indispensable que tous les jeunes soient initiés aux notions fondamentales de nombre et d’opération, de vitesse et de force, d’atome et de molécule, de microbe et de virus, de genre et de nombre, d’événement et de chronologie etc., sous la forme de disciplines scolaires. Pour différentes raisons.

    La thermodynamique, la mécanique, l’électricité, la chimie sous-tendent les réalisations de la société industrielle. Cela concerne effectivement les futurs spécialistes. Mais tout le monde ne sera pas technicien ou ingénieur. En revanche, tout le monde a besoin d’une culture de base en la matière. Au travail mais aussi dans le quotidien car il faut connaître l’environnement moderne. Se connaître aussi, savoir de quoi est fait l’être humain et comment son corps fonctionne, même si tout le monde n’est pas médecin ou infirmier ou infirmière. Et il y a les débats de société, portant par exemple sur le nucléaire ou les OGM, auxquels le citoyen doit pouvoir participer et pour cela savoir ce dont il est question. Il peut alors s’appuyer sur les connaissances scientifiques qu’il a acquises grâce aux cours de sciences physiques et de SVT qui sont de fait des conditions d’un exercice plein de la citoyenneté. Il s’agit donc des trois missions traditionnelles et fondamentales de l’école, à savoir former l’homme, le travailleur et le citoyen.

    Pourquoi et comment l’informatique à l’école ?

    Pour les mêmes raisons que précédemment. En effet, on parle beaucoup de la place occupée par le numérique, de plus en plus d’activités et de réalisations reposant sur la numérisation de l’information. Or, au cœur du numérique, il y a la science informatique car elle est la science du traitement et de la représentation de l’information numérisée. Elle sous-tend le numérique comme la biologie sous-tend le vivant et les sciences physiques l’industrie de l’énergie.

    L’informatique est la forme contemporaine de l’industrialisation. Elle intervient dans l’économie de trois façons essentielles :

    • Au niveau de la production de biens manufacturés ou agricoles par l’automatisation de plus en plus poussée des processus de production, automatisation partielle ou de plus en plus souvent totale (robotisation) et contrôle permanent du bon déroulement des processus.

    • Au niveau de la création de nouveaux produits ou de l’amélioration de produits anciens par l’introduction, dans la plupart des objets ou machines vendus, de puces qui assurent des fonctions de plus en plus nombreuses avec plus de précision et de fiabilité que ne pouvaient le faire l’utilisateur humain ou des mécanismes anciens. Les exemples paradigmatiques en sont la carburation et le freinage des voitures automobiles ; le vaste chantier des économies d’énergie dans la construction et l’habitat repose aussi sur leur informatisation.

    • Au niveau de la gestion des entreprises comme des administrations, les programmes informatiques, qui ont dès le début de celle-ci remplacé les méthodes traditionnelles de comptabilité et de gestion des stocks ou des commandes, font place désormais à des « systèmes d’information » qui gèrent tous les flux de données nécessaires à chaque acteur, du directeur au plus modeste employé, aussi bien ceux dont il doit disposer venus d’ailleurs que ceux qu’engendre son activité quotidienne. En ce sens le système d’information devient le cœur même de l’entreprise, qui en irrigue toutes les parties et permet de savoir, donc de contrôler et rationaliser, tout ce qui s’y passe : il est l’outil stratégique par excellence sur lequel reposent toutes les décisions à prendre concernant les diverses composantes de l’entreprise.

    Les débats de société suscités par l’informatique se multiplient. La neutralité du Net, le vote électronique, les libertés numériques font la Une de l’actualité. L’année 2009 a vu le vote de la loi Création et Internet dite loi Hadopi. En 2006, la transposition par le Parlement de la directive européenne sur les Droits d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information (DADVSI) avait été l’occasion de débats complexes où exercice de la citoyenneté rimait avec technicité et culture scientifique.

    En effet, s’il fut abondamment question de copie privée, de propriété intellectuelle, de modèles économiques… ce fut sur fond d’interopérabilité, de DRM, de code source, de logiciels en tant que tels. Dans un cas comme dans l’autre, on a constaté un sérieux déficit global de culture du numérique, largement partagé. La question se pose bien de savoir quelles sont les représentations mentales opérationnelles, les connaissances scientifiques et techniques qui permettent à tout un chacun d’exercer pleinement sa citoyenneté. « Cliquer sur une souris » et utiliser les fonctions simples d’un logiciel ne suffisent pas à les acquérir, loin de là.

    Il y a d’autres débats sociétaux qui requièrent, eux aussi, une culture informatique. Dans les colonnes du Monde diplomatique, en décembre 2002, John Sulston, prix Nobel de médecine, évoquant les risques de privatisation du génome humain, indiquait que « les données de base doivent être accessibles à tous, pour que chacun puisse les interpréter, les modifier et les transmettre, à l’instar du modèle de l’open source pour les logiciels ». Open source, logiciels libres, code source… C’est quoi le code source pour quelqu’un qui n’a jamais écrit une ligne de programme ? Le libre est aussi un outil conceptuel qui aide à appréhender les problématiques de l’immatériel. Il suppose une culture générale informatique.

    Et tout un chacun rencontre le numérique et l’informatique dans la vie de tous les jours. De l’utilisation de l’ordinateur à celui de son smartphone en passant par la feuille d’impôts remplie sur le Web et le contrat avec son fournisseur d’accès.

    Or, concernant l’enseignement de l’informatique, le rapport Stratégie nationale de recherche et d’innovation, SNRI, faisait le constat en 2009 que, d’une façon générale, « le système éducatif ne lui avait pas donné une place suffisante en regard des enjeux futurs, industriels et d’innovation pour l’ensemble de l’économie nationale, et de participation à la vie sociale et politique de la part des citoyens. Absent aux niveaux primaire et secondaire, il est inexistant ou trop limité dans les classes préparatoires aux grandes écoles. La majorité des ingénieurs et chercheurs non informaticiens n’acquièrent pendant leur cursus qu’un bagage limité au regard de ce que l’on observe dans les autres disciplines. Pourtant, ils utiliseront ou pourront avoir à décider de l’utilisation d’outils informatiques sophistiqués. Il est à craindre qu’ils ne le fassent pas avec un rendement optimal ou que, en position de responsabilité, ils sous-estimeront l’importance du secteur ».

    Comment l’école doit-elle faire pour donner à tous l’indispensable culture informatique ? C’est simple ! Il convient que l’école fasse ce qu’elle fait avec les autres domaines de la connaissance : offrir à tous les élèves un cadre disciplinaire. Tous les enseignements se font en français (même pour une petite part l’apprentissage des langues étrangères). Pour autant, il y a un cours de français. Il est indispensable aujourd’hui d’initier les élèves aux notions centrales de l’informatique, devenues incontournables : celles d’algorithme, de langage et de programme, de machine et d’architecture, de réseau et de protocole, d’information et de communication, de données et de formats, etc. Cela ne peut se faire qu’au sein d’une vraie discipline informatique.

    Jean-Pierre Archambault

    Référence:  voir article complet ici

  • Le numérique va révolutionner l’éducation … vraiment ?

    Nous entendons ou lisons très souvent – notamment dans binaire – que le numérique bouleverse à peu près toutes les facettes de nos vies. Que ce soit la médecine, le transport, l’industrie, le divertissement, quasiment tous les secteurs d’activité connaissent de profondes évolutions dues à l’informatique et ses applications. A première vue, l’éducation ne semble pas échapper à la règle si l’on croit les analyses les plus répandues. Gérard Giraudon et Margarida Romero, deux experts du numérique pour l’éducation, décryptent pour nous une vidéo de Derek Muller expliquant pourquoi ce n’est pas si simple. Pascal Guitton & Thierry Viéville

    Depuis le début du 20ième siècle, nos sociétés ont connu nombre de révolutions technologiques (thermodynamique, nucléaire, informatique…) qui ont impacté la plupart des domaines (industrie, transports, commerce, agriculture, média…). Mises à part quelques exceptions, l’éducation n’en fait pas partie et les cours sont toujours donnés par un·e seul·e enseignant·e à des groupes d’élèves réunis dans une salle de classe. Certains pourraient reprocher cet état … à l’inertie de l’institution. Mais l’une des raisons pour laquelle la technologie n’a pas révolutionné l’éducation est au coeur même de ce qui est son rôle spécifique  : créer un contexte social et relationnel adapté pour accompagner dans l’apprentissage des savoirs scolaires et des compétences nécessaires. Les apprentissages scolaires ne se produisent pas spontanément par la simple socialisation de l’enfant (Tricot, 2014) : il est nécessaire d’organiser les situations d’apprentissage. A l’école, ces savoirs se développent dans un contexte scolaire et social avec d’autres apprenant·e·s et des enseignant·e·s  attentionné·e·s. Dans une vidéo publiée en 2014,  Derek Muller de Veritasium démystifie ces “révolutions” technologiques et place l’enseignant·e au coeur d’une relation éducative essentielle pour engager les élèves dans les activités d’apprentissage. Au delà de l’engagement et l’autonomisation de l’apprenant·e soulignés par Muller, nous devons également considérer le rôle des enseignant·e·s au niveau de l’ingénierie des activités d’apprentissage et de leur orchestration, sans oublier les précieuses rétroactions qui contribuent, plus généralement, aux apprentissages.

    Au delà de la vidéo

    Oui  « le rôle fondamental d’un enseignant n’est pas de fournir des informations, mais de guider le processus social d’apprentissage ; le travail d’un enseignant est d’inspirer, de mettre au défi, de motiver ses élèves à vouloir apprendre ». Et l’enseignant n’est pas qu’un animateur charismatique, il doit aussi avoir un rôle d’ingénieur pédagogique et de régulateur externe des processus d’apprentissage pendant l’activité et apporter des rétroactions permettant l’évaluation formative.

    Comme l’explique très bien André Tricot en partageant les études sur les innovations pédagogiques et apprendre avec le numérique (voir par exemple cette présentation vidéo), le numérique est souvent un outil de plus, qui n’apporte pas en soi, d’innovation pédagogique. L’innovation technologique apportée par des technologies  comme la réalité augmentée (RA), réalité virtuelle (RV) ou encore la robotique pédagogique et les approches de fabrication numérique (maker) changent la médiation des échanges mais ne sont pas en tant que telles des innovations pédagogiques. Tout comme les outils technologiques historiques (tableau blanc, crayon, matériel de construction…), c’est le type de médiatisation des activités qui peut donner lieu, dans certains cas, à une innovation pédagogique.

    Le numérique ne révolutionne pas les apprentissages, mais, est-ce que le numérique peut contribuer à comprendre les processus d’apprentissage ? Au delà du rôle de la technologie comme outil de médiation dans ces processus, le numérique nous permet de générer des traces de certains comportements de l’apprenant tant dans le cadre d’environnements informatiques d’apprentissage humain (EIAH) que par l’analyse automatique (vidéo ou via des objets connectés) des activités d’apprentissage non médiatisées par la technologie. Certains EIAH sont conçus pour générer des traces d’apprentissage pertinentes afin de permettre un retour d’information servant à la régulation des apprentissages, ou encore, à leur évaluation, dans une perspective de recherche. Nous pouvons même envisager l’émergence d’une approche computationnelle en éducation, qui applique des méthodes d’apprentissage automatique (machine learning) à l’ensemble de ces données générées.

    L’utilisation de telles approches nous permet de rendre davantage visible et traçable les comportements d’élèves ou groupes d’élèves liés à certains processus d’apprentissage.

    Sans le support du numérique, les traces liées à ces processus doivent être générées par des  processus de codification coûteux en ressources humaines. Prenons l’exemple de l’analyse de la résolution de problème dans une tâche type Tour de Hanoï. Pour son analyse, nous pouvons enregistrer la vidéo, puis ensuite codifier manuellement les opérations réalisées pendant l’activité. Une autre option serait de faire de chacun des disques un objet connecté permettant de générer les traces du comportement des élèves qui sont ensuite exploitées pour  analyser l’activité réalisée par un grand nombre de participants à cette tâche, ce qui, après l’effort de codification, permet de générer sans coût supplémentaire des traces massives pour un modèle de problème bien défini. Cette deuxième approche ouvre la porte à l’application des approches d’apprentissage machine à des tâches d’apprentissage concrètes : analyser les processus avec des approches data science obtenues avec des  traces pertinentes et offrir à un apprenant des aides personnalisées à partir d’un modèle développé sur un nombre important de participants.

    Nous développons cette approche dans le contexte du projet AIDE mené à la suite du projet ANR CreaMaker qui a permis de développer des modèles de trace et des modèles en neurosciences computationnelles de l’équipe Mnemosyne. Dans ce projet, l’usage du numérique est au service de la génération de traces permettant de comprendre l’apprentissage humain dans une tâche concrète de résolution de problèmes.

    La technologie ne révolutionne l’apprentissage mais peut permettre de l’étudier avec des nouvelles approches d’exploration et d’expérimentation dans des contextes spécifiés (Le numérique ne peut pas être utilisé sans tenir compte de la tâche et du contexte) fondées sur de l’acquisition de données. L’exploitation des approches computationnelles pour des tâches très formelles par exemple en mathématiques ou en grammaire est plus simple que pour des activités engageant des débats philosophiques ou des controverses environnementales, qui nécessitent davantage d’accompagnement humain dans le déroulement du débat. Par ailleurs, le contexte de coprésence ou distance est également à prendre en compte, des enseignant.e.s pouvant engager des élèves dans le contexte d’une classe, rencontrent davantage de difficultés dans des contextes de distance comme celles que nous vivons en confinement. D’ailleurs, la technologie peut-elle pallier (en partie) l’absence de coprésence entre l’enseignant.e et ses élèves ?  La réponse à cette question reste complexe, mais nous pouvons observer que les réseaux formels et informels des apprenant.es qui s’entraident, tout comme la mutualisation de ressources et le détournement pédagogique de certains outils, initialement non prévus pour un usage scolaire, ont permis de co-construire des solutions dans des situations d’urgence. Les compétences numériques des enseignant.e.s, tout comme celles des élèves et des familles doivent pouvoir être soutenues pour pouvoir faire des choix éclairés dans ces contextes nouveaux. Mais ce n’est pas tant une question d’outil ou de technologie qu’un enjeu de pédagogie, de compétences et de communauté éducative travaillant ensemble envers la réussite de tou.te.s et chacun.e. Ainsi, l’apprentissage de l’informatique  y compris sans utiliser d’écran, sans technologie numérique donc, s’avère aussi une opportunité pour des élèves n’ayant pas le même niveau de réussite dans un contexte éducatif traditionnel, et dans certains cas, permet aux jeunes de se réengager dans leur éducation.

    Gérard Giraudon (Inria) & Margarida Romero (Université Côte d’azur, Directrice du Laboratoire d’innovation et numérique pour l’éducation)

     

    Image extraite de la vidéo de Derek Muller.

    Traduction du texte de la vidéo (avec l’autorisation de Derek Muller)

    Tous les épisodes d’une non-révolution.

    “Ça” va révolutionner l’éducation … aucune prédiction n’a été faite aussi souvent et aussi incorrectement que celle-ci.

    En 1922, Thomas Edison déclarait que : « Le film est destiné à révolutionner notre système éducatif et dans quelques années, il va supplanter largement, voire entièrement, l’utilisation des livres. » Oui. Et vous savez comment ça a tourné ?

    Dans les années 1930, c’était la radio. L’idée était que vous pouviez diffuser les cours d’experts directement dans les classes, augmentant la qualité de l’éducation pour plus d’étudiants à moindre coût. Et ça voulait dire avoir besoin de moins de professeurs expérimentés, un thème commun à toutes les révolutions proposées de l’éducation, comme celle de la télévision éducative dans les années 1950 et 1960. Des études ont été menées pour déterminer si les étudiants préféraient regarder un cours en direct ou être assis dans une salle à côté, où la même leçon était diffusée via une télévision. Que préférez-vous ?

    Dans les années 1980 il n’y avait pas débat. Les ordinateurs étaient la solution révolutionnaire à nos problèmes éducatifs. Ils étaient multimédia, interactifs, et pouvaient être programmés pour faire pratiquement tout ce que vous vouliez. Leur potentiel était évident.  Les chercheurs avaient l’intuition que s’ils pouvaient apprendre à des enfants à programmer, disons comment faire bouger une tortue sur un écran, alors leur capacité à faire des raisonnements procéduraux s’améliorerait. Et comment ça a marché ? Et bien disons que les étudiants sont devenus meilleurs à programmer la tortue, …

    Même dans les années 1990 nous n’avions pas appris de l’échec de nos précédentes prédictions, et je cite, « L’utilisation des vidéodisques dans les classes s’accroît chaque année et promet de révolutionner ce qui se passera dans les classes de demain ». Vidéodisques? Oui, ces énormes CD surdimensionnés. Vous vous souvenez quand ils ont révolutionné l’éducation?

    Depuis les annés 2000 des tas de choses sont sur le point de révolutionner l’éducation comme les tableaux intelligents, les smartphones, et les MOOCs. Ceux-ci sont des cours en ligne ouverts à tou·te·s («massive open online courses» en anglais). Et certains croient que nous nous rapprochons de la machine à enseigner universelle, un ordinateur si rapide et si bien programmé que ce serait quasiment comme avoir votre propre robot tuteur.

    Un étudiant pourrait travailler avec des cours bien structurés adaptés à leur propre rythme et un avis personnellement adapté, et le tout sans qu’un enseignant, tatillon et coûteux pour la société, s’en mêle.

    Mieux comprendre le processus d’apprentissage avec des outils technologiques.

    Prenons le processus d’apprentissage. Disons que vous voulez enseigner à quelqu’un comment le coeur humain pompe le sang. Quel support éducatif serait à votre avis le plus efficace, cette animation avec explication ou cette série d’images statiques avec texte ? Évidemment l’animation est meilleure. Ne serait-ce que parce qu’elle montre exactement ce que le coeur fait. Pendant des dizaines d’années, les recherches sur l’éducation se sont concentrées sur des questions comme celle-là. Est-ce qu’une vidéo encourage l’apprentissage mieux qu’un livre ? Est-ce que les cours en direct sont plus efficaces que des cours télévisés ? Les animations sont-elles meilleures que des images statiques ? Dans toute étude bien contrôlée, le résultat est : aucune différence significative. Tant que le contenu est équivalent entre les deux traitements le résultat en termes d’apprentissage est le même quel que soit le média.  Comment est-ce possible ? Comment quelque chose qui a l’air aussi performant que l’animation peut-il ne pas être meilleur que des images statiques ? Et bien premièrement  les animations bougent rapidement et vous pouvez rater quelque chose. De plus, comme les éléments sont animés pour vous,  vous ne visualisez pas mentalement  comment les éléments s’articulent. Donc vous n’avez pas à investir un effort mental important, ce qui le rendrait marquant. En fait, des fois les images statiques sont plus efficaces que les animations.  Nous ne sommes pas limités par les supports que nous pouvons fournir aux étudiants. Ce qui limite l’apprentissage c’est ce qui se passe dans la tête de l’étudiant. C’est là que se passe la partie importante de  l’apprentissage. Aucune technologie n’est intrinsèquement supérieure à une autre. Les chercheurs ont passé tellement de temps à analyser si une technologie ou un média était plus efficace qu’un autre, qu’ils n’ont [parfois] pas cherché comment utiliser la technologie pour promouvoir des processus de pensée efficaces. Donc la question est en fait : quelles expériences engendrent le mode de pensée nécessaire à l’apprentissage ? Il y a peu, ce type de recherche a été lancé et nous apprenons des choses importantes. Ça peut paraître évident, mais il apparaît qu’apprendre avec des images et du texte ensemble, que ce soit des animations avec narration ou des images statiques avec du texte, est mieux que d’apprendre avec du texte seul. Aussi, nous observons que tout ce qui est superflu doit être éliminé d’une leçon. Par exemple, le texte à l’écran entre en concurrence avec les visuels, donc les étudiants apprennent mieux quand il est absent que lorsqu’il est présent. Maintenant que nous savons comment faire de meilleures vidéos éducatives, et comme toute expérience peut être simulée en vidéo, YouTube devrait être la plateforme qui va révolutionner l’éducation. Le nombre de vidéos éducatives sur YouTube augmente chaque jour.

    Donc pourquoi avons nous besoin d’enseignants ?

    Et bien, si vous pensez que le  travail principal d’un enseignant est de transmettre l’information de son cerveau à celui de ses étudiants, alors c’est vrai, il est devenu obsolète. Vous imaginez probablement une classe où l’enseignant déverse des connaissances à un rythme qui est trop rapide  pour la moitié, et trop lent pour le reste et donc adapté à personne. Heureusement le rôle fondamental d’un enseignant n’est pas de fournir l’information. C’est de guider le processus social d’apprentissage. Le travail d’un enseignant est  d’intéresser et de mettre au défi les élèves qui veulent apprendre et de motiver ceux pour qui c’est plus difficile. Oui, il explique et démontre et montre des choses, mais en réalité ce n’est pas son but. Le rôle le plus important d’un enseignant c’est de faire en sorte que chaque étudiant se sente important, pour qu’il se sente responsable de faire l’effort d’apprendre. Tout cela ne veut pas dire que la technologie n’a pas eu d’impact sur l’éducation. Les élèves et les enseignants travaillent et communiquent avec des ordinateurs. Et des vidéos  sont utilisées en dehors et pendant les cours. Mais tout cela est mieux caractérisé comme étant une évolution, pas une révolution. Les fondements de l’éducation sont toujours l’interaction sociale entre enseignants et élèves. Aussi avancée que chaque nouvelle technologie semble être, comme les vidéos ou les ordinateurs ou les tableaux intelligents, ce qui est vraiment important c’est ce que qui se passe dans la tête de l’apprenant.e. Et faire réfléchir un élève s’obtient de façon optimale dans un contexte social avec d’autres élèves et un enseignant  attentionné et bienveillant.

     

  • La difficile mise en place de l’enseignement à distance à l’IUT

    Le confinement a bouleversé profondément toutes nos conditions de vie : familiale, sociale, professionnelle. Quid des étudiants, des personnels et des enseignants ? Nous vous proposons de partager un témoignage rédigé par un collectif de personnels et d’enseignants de l’IUT de Bordeaux qui nous font part de leurs expériences et qui dressent un premier bilan de la période de confinement où il a fallu faire face à l’imprévu et tenter de maintenir un enseignement à distance. Pascal Guitton

    Comme certainement toutes les universités de France, le jeudi 12 mars à l’annonce de la fermeture des campus, l’équipe enseignante du département informatique de l’IUT de Bordeaux n’était pas prête. Parmi toutes les problématiques liées notamment à la précarité des étudiants, à leurs stages, etc., l’un des mots d’ordre était d’assurer la continuité pédagogique. Mais comment faire ? Trop de questions sans réponses : tous les étudiants ont-ils un ordinateur ? Une connexion internet de qualité ? Un espace pour travailler ? Doit-on maintenir tel quel l’emploi du temps (36h/semaine) ? Fait-on les cours par visio ? Par chat ? Avec quels outils ?

    Première bonne surprise, les quatre jours qui nous séparaient du début du confinement total ont suffi à répondre aux questions d’ordre matériel. La direction des études et le service technique de l’IUT ont réussi à s’organiser en un temps record pour fournir un ordinateur aux étudiants qui en avaient besoin et recenser les très rares étudiants qui prévoyaient d’avoir des difficultés pour accéder à internet.

    A contrario, la question des solutions logicielles nous a posé plus de problèmes. L’équipe de techniciens de l’IUT a fourni un très gros travail pour accélérer le déploiement sur nos serveurs de logiciels pouvant nous aider à assurer cette continuité pédagogique (machines virtuelles, bureaux accessibles à distance…). Si nous avions déjà à notre disposition un très bon outil de chat textuel (mattermost), côté outils de visioconférence, le bilan était sans appel. L’université n’était pas préparée à l’enseignement à distance. La majorité des outils (notamment Rendez-vous de Renater, et l’ancienne version de Big Blue Button) fonctionnent mal, surtout dès qu’on dépasse un certain nombre de présents, ou n’offrent pas toutes les fonctionnalités nécessaires au bon déroulement d’un cours : chat textuel, partage d’écran, canal séparé pour répondre à un étudiant, par exemple.

    Côté solutions commerciales, Zoom et Discord rassemblaient ces fonctionnalités, tout en tenant la charge, sans dégrader la qualité audio/vidéo. Par contre, nous avons très vite identifié que ces plateformes propriétaires posent de graves problèmes auxquels nous ne souhaitions pas exposer nos étudiants. Dans les deux cas, cela oblige à accepter des conditions d’utilisations contraires à nos valeurs : recueil d’informations personnelles, réception de SMS, cession d’informations à des « compagnies liées », etc. (Voir les Conditions Générales d’Utilisation de Discord, et cet article paru dans Libération). Se pose même la question de la légalité d’imposer de telles conditions à nos étudiants, et de la conformité au RGPD.

    De plus, ces plateformes nécessitent l’installation d’un client propriétaire, qui peut donc potentiellement accéder à toutes les données de l’utilisateur, notamment via des malwares. Pas une semaine sans qu’un article dans la presse ne fasse mention de problèmes de sécurité avec Zoom. Plus de 500 000 comptes auraient été piratés. Les données de ces comptes seraient en vente sur le darkweb (cf source). Cela a abouti à des approches contradictoires : Zoom est par exemple préconisé par l’université, mais interdit à l’Inria.

    Toutes ces solutions commerciales posent également le problème de l’accès aux sessions par partage de liens publics et de mots de passe communs à tous les participants. Autant dire que c’est un jeu d’enfant pour une personne étrangère à l’université de s’infiltrer dans ces cours virtuels et d’y semer la zizanie (voir cet article paru dans Marianne). Quelques incidents ont déjà été remontés par des collègues de l’université de Bordeaux.

    Consciente de ces problèmes, l’université de Bordeaux, via la structure MAPI (Mission d’Appui à la Pédagogie et à l’Innovation) et la DSI (Direction des systèmes d’information), a réussi à mettre en place en trois semaines un serveur de visio-conférence avec la nouvelle version de Big Blue Button. Celle-ci coche nos critères essentiels en termes de fonctionnalités, de performances, de sécurité, et de respect de la vie privée. Désormais nous pouvons nous passer de Discord, Zoom, Skype…

    Nous en sommes à maintenant cinq semaines de cours à distance et nous pouvons également tirer un premier bilan de ce nouveau type d’enseignement. Étudiants et enseignants ont fait part de leur ressenti. Pour les étudiants, la majorité fait remonter une charge de travail supplémentaire et une fatigue accrue par la répétition des cours à distance. Quelle que soit la solution choisie (visio, chat textuel ou capsule vidéo) le rythme est trop soutenu, la difficulté à interagir avec l’enseignant est réelle.

    Pour les enseignants, ces nouvelles conditions ont généré une charge de travail énorme dans un temps contraint. Dès la première semaine, le temps de préparation et d’adaptation des cours a explosé. Il en est de même pour le temps passé à assurer la continuité de la direction et le suivi des étudiants (en particulier les stages) avec un calendrier global qui n’a pas bougé d’un iota.

    De l’avis général des collègues du département informatique de l’IUT de Bordeaux, il est compliqué d’enseigner à distance dans de bonnes conditions. Ainsi il est difficile, voire impossible, de ressentir si le cours se passe bien ou pas, si le groupe avance ou pas. Interagir avec des étudiants à qui l’on a donné une série d’exercices reste également complexe. Certains étudiants ne prennent pas la parole, d’autres un peu trop, et traiter un canal par étudiant devient vite ingérable. Si nous essayons de nous adapter en transformant nos cours (pédagogie inversée, approche par projet, capsules audio ou vidéo), il n’existe pas de solution miracle. Le manque de cours en face à face se fait déjà ressentir, et ralentit globalement la progression. Dans les faits, chaque enseignant réduit, dans la mesure du possible, son cours aux compétences jugées essentielles. Au final, l’enseignement à distance représente un effort supplémentaire pour tous, pour un résultat moindre.

    Depuis l’annonce présidentielle de la non-reprise des cours avant l’été, d’autres défis s’annoncent pour l’équipe enseignante. Par exemple, comment noter le travail à distance alors qu’il est impossible de garantir une équité (accès à un ordinateur, à une connexion internet, à un environnement calme) ? Quelle est la valeur d’une évaluation dont on ne peut garantir l’authenticité de l’auteur, ni l’absence de fraude ? Pour le moment, notre équipe pédagogique n’entrevoit aucune solution satisfaisante.

    Dans une vidéo postée le 15 avril, le président de l’Université de Bordeaux dresse un premier bilan très positif de cet enseignement à distance : « les enseignants donnent une formidable impulsion à la dynamique de transformation pédagogique que nous avions souhaitée et dont nous saurons tirer les leçons demain ». L’expérience de ces cinq dernières semaines nous pousse à modérer ces propos. Hors période de confinement, nous restons convaincus des bienfaits et de l’efficacité d’assurer nos missions d’enseignement en face à face. Pour le bien de tous (étudiants, enseignants, personnel technique et administratif), il faut que cela reste la norme et que l’enseignement à distance reste l’exception.

    Neuza Alves, Michel Billaud, Romain Bourqui, Brigitte Carles, Sophie Cartier, Arnaud Casteigts, Isabelle Dutour, Patrick Félix, Stéphane Fossé, Olivier Gauwin, Romain Giot, Olivier Guibert, Michel Hickel, Colette Johnen, Nicholas Journet, Sidonie Marty, Bruno Mery, Sylvie Michel, Alexandra Palazzolo, Grégoire Passault, Arnaud Pecher, Pierre Ramet, Karine Rouet, Eric Sopena, Christine Uny, Eric Woirgard (Enseignants et personnels de l’IUT de Bordeaux)

  • Enjeux sociétaux, c’est le sujet du TIPE 2020-2021

    Le Travail d’Initiative Personnelle Encadré (TIPE) est une épreuve commune à la plupart des concours d’entrée aux grandes écoles scientifiques. Il permet d’évaluer les étudiant·e·s non pas sur une épreuve scolaire mais à travers un travail de recherche et de présentation d’un travail personnel original. C’est un excellent moyen d’évaluer les compétences. Cela peut être aussi une épreuve inéquitable dans la mesure où selon les milieux on accède plus ou moins facilement aux ressources et aux personnes qui peuvent aider. Pour aider à maintenir l’équité, les chercheuses et les chercheurs se sont mobilisés pour offrir des ressources et du conseil à toute personne pouvant les solliciter. Thierry Viéville.
    Free-Photos Pixabay

    TIPE ? Comme tous les ans, en lien avec sillages.info et l’UPS pour les CGPE, Interstices et Pixees vous proposent des ressources autour des sciences du numérique, informatique et mathématiques.

    Le thème pour l’année 2020-2021 du TIPE commun aux filières BCPST, MP, PC, PSI, PT, TB, TPC et TSI est intitulé : enjeux sociétaux. Ce thème pourra être décliné sur les champs suivants : environnement, sécurité, énergie.

     

    L’article complet sur Pixees.

    Le recueil de ressources d’Interstices.

    © Inria / Photo C. Morel

    À l’heure où ces lignes sont écrites, une partie de l’humanité est confinée pour maîtriser la propagation de l’épidémie de coronavirus Covid-19. Cette crise sanitaire exceptionnelle en désagrégeant nos vies et nos organisations, a relativisé l’importance de nombreuses questions et a bousculé de nombreuses croyances. Bien malin qui peut décrire les conséquences à long terme de cette épidémie. Bien sûr, les rumeurs et les fausses informations sont toujours bien présentes mais une idée a retrouvé une place centrale dans le débat public : la science.

    En cherchant à partir d’observations et de raisonnements rigoureux à construire des connaissances, la science permet de comprendre, d’expliquer mais aussi d’anticiper et parfois de prédire. Et aujourd’hui, les sciences du numérique (modélisation, simulation, communication, information…) ont un rôle capital.

    Les thématiques abordées ci-dessous sont majeures : risques naturels, énergies, sécurité informatique, sobriété numérique, avec souvent des sujets reliant science et société. C’est l’occasion pour vous d’exercer vos connaissances, votre curiosité, votre capacité de synthèse. L’objectif n’est pas tant de résoudre l’une de ces questions que d’y donner un éclairage personnel et scientifique. Chacune des problématiques décrites ci-dessous ne constitue pas exactement un sujet de TIPE mais plutôt un thème duquel vous pourrez extraire votre sujet. Le TIPE s’articule souvent autour de la trilogie théorie/expérience/programme. Les recherches décrites ici portent sur les sciences du numérique, l’expérimentation numérique y a une grande place.

    Même si, suite à l’épidémie de coronavirus Covid-19, les destructions ne sont pas matérielles, beaucoup est à refonder, à rebâtir. Et vous qui êtes étudiantes et étudiants de filières scientifiques, votre rôle sera prépondérant.

    Pour conclure cette brève présentation et insister à nouveau sur l’importance de la science, je rappellerai l’article 9 de la charte de l’environnement (texte à valeur constitutionnelle) : « La recherche et l’innovation doivent apporter leur concours à la préservation et à la mise en valeur de l’environnement. »

  • “Parlons Maths” : Animath se démathérialise !

    Les mathématiques s’invitent chez vous ! Une nouvelle activité pour parler de maths a été lancée en quelques jours par l’association Animath. Sur “Parlons Maths”, des bénévoles proposent chaque jour une vidéo en direct avec une énigme, des exposés ainsi que des discussions mathématiques. Pendant le direct, les internautes peuvent commenter à l’écrit via le tchat.

    Les publics visés par cette activité sont les élèves de collège et lycée, dans la continuité des activités existantes d’Animath. Il s’agit d’activités périscolaires et non de cours, les contenus ne suivant pas nécessairement le programme scolaire.

    Actuellement, la chaîne “Parlons maths” diffuse 2h par jour, du lundi au vendredi de 16h à 18h. Plusieurs exposés de 30 min à 1h s’enchaînent pendant ce créneau : conférence grand public, analyse d’un problème (du tournoi TFJM², des Correspondances, ou de MATh.en.JEANS, notamment, présentation d’une notion mathématique, historique, d’une énigme qui sera résolue le lendemain, questions/réponses avec l’intervenant, etc.

    Retrouvez-nous sur :

  • Lancement du Mooc Class’Code IAI : une formation en ligne pour appréhender l’intelligence artificielle… avec intelligence !

    A partir du 6 avril, Class’Code lance une formation gratuite en ligne pour permettre à toutes et tous de comprendre les enjeux de l’intelligence artificielle en fournissant aux apprenants des repères simples et actuels, sous la forme de parcours élaborés par des experts en sciences informatiques. Grâce à des contenus ludiques et variés, le MOOC permet à chacun·e de décrypter les discours sur l’intelligence artificielle, d’expérimenter, de comprendre comment cette avancée technologique s’inscrit dans l’histoire des humains et de leurs idées, et offre plus largement les moyens de s’approprier le sujet.

    Nous vivons au temps des algorithmes et de plus en plus de tâches cognitives dites “intelligentes” tant qu’elle sont exécutées par un humain sont aujourd’hui mécanisées et exécutées par des machines. Tous les aspects de la société – économiques, sociétaux, culturels – sont profondément impactés par les avancées informatiques et cette situation prend une tournure nouvelle avec l’arrivée de ce qui est désigné sous le terme d’intelligence artificielle.

    L’IA, au-delà des idées reçues

    Employée par tous désormais, la notion d’“intelligence artificielle” nécessite pourtant d’être expliquée et comprise afin de pouvoir s’en emparer et de prendre le recul nécessaire face aux idées reçues qui sont nombreuses. Tout en rappelant que l’intelligence artificielle doit être au service de l’humain, le nouveau Mooc de Class’Code décrypte par étapes les enjeux et les leviers technologiques liés à l’IA. La formation s’attache à présenter les principes de l’apprentissage machine (machine learning) et définit des mots techniques comme l’apprentissage profond (deep learning), ainsi que la place cruciale de la maîtrise des jeux de données. Il s’agit par l’intermédiaire d’un cours interactif de partager une culture minimale sur le sujet, afin de choisir librement et de maîtriser l’usage de ces technologies.

    Une mini-formation citoyenne qui démystifie sans simplifier

    Si l’objectif de la formation est bien de toucher un public large non néophyte par des biais ludiques, des vidéos et des activités, l’équipe d’experts* ayant élaboré les cours met avant tout l’accent sur des savoirs rigoureux permettant à l’apprenant.e de se forger une vision correcte et opérationnelle sur l’IA et ses enjeux.

    Disponible sur la plateforme FUN MOOC, co-réalisée par Inria Learning-Lab, la formation Class’Code IAI hébergée par Inria est ouverte à tous dès le 6 avril.

    À propos de Class’Code

    Class’Code, projet initialement créé en 2014 dans le cadre du PIA, est une association d’utilité publique qui a pour ambition de répondre au besoin de formation et d’accompagnement de la population en matière d’éducation à la pensée informatique dans un contexte où la France affiche un certain retard face au enjeux numériques. Class’Code regroupe des acteurs privés et publics, et coordonne des actions destinées au grand public sur tout le territoire tout en produisant des ressources innovantes accessibles à tous, en ligne et gratuitement.

    A propos d’Inria 

    Inria est l’institut national de recherche en sciences et technologies du numérique. La recherche de rang mondial et l’innovation technologique constituent son ADN, avec pour ambition de faire émerger et d’accompagner des projets scientifiques et entrepreneuriaux créateurs de valeur pour la France dans la dynamique européenne.

    *Une co-production Class’Code avec Inria, Magic Makers , S24B interactive, la participation de 4 minutes 34, Data Bingo, Université de Nantes, La Compagnie du Code et de La Ligue de l’enseignement, et avec le soutien du Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, UNIT, EducAzur et leblob.fr, avec le concours et la collaboration de :

  • Informatique pour tou·te·s pendant le confinement

    L’association France-IOI et ses partenaires mettent à votre disposition un ensemble d’activités interactives réalisables à la maison, pour progresser en programmation, algorithmique, cryptanalyse, et en pensée informatique.

     

     

    Il s’agit d’activités pour tous les âges, de 6 à 18 ans, et pour tous les niveaux, du niveau débutant absolu jusqu’à l’entraînement pour les Olympiades.

    Les activités sont ouvertes à tous. Les enseignants, s’ils le souhaitent, peuvent inscrire leurs élèves et suivre leurs progrès à distance.

    Des activités pour tous, même ceux qui n’y connaissent rien à l’informatique !

    Sont inclus des parcours d’apprentissage et des archives de concours :

    • Le concours Castor, pour découvrir l’informatique,
      (700 000 partipant·e·s)
    • Le concours Algoréa, pour apprendre les bases de la programmation,
      (220 000 partipant·e·s)
    • Le concours Alkindi, pour s’initier à la cryptanalyse,
      (60 000 partipant·e·s)
    • Le site France-ioi, pour progresser en algorithmique,
      (1.5 millions de sujets résolus)
    • Les contenus SNT, développé pour les élèves de seconde,
    • Les contenus « programmation dès 6 ans », même sans savoir lire.

    Le tout en accès gratuit et illimité :

    http://www.france-ioi.org/confinement/

     

  • Quarante activités pour la quarantaine

    Les acteurs de Class´Code se sont mobilisés rapidement pour mettre à votre disposition des ressources variées au delà de nos ressources usuelles afin de vous aider à vous occuper de vos enfants si vous êtes parent, et à assurer la continuité de la formation en science, tout particulièrement en informatique, suite aux mesures de restrictions des déplacements, si vous êtes enseignant ou animateur. C’est notre mission de partager avec le plus grand nombre les meilleures ressources scolaires ou familiales. Alors, faites vos jeux…

     

    Une question ? Un avis ? Besoin de conseil quel qu’il soit ? Notre bureau d’accueil est là via classcode-accueil@inria.fr, on vous répond au plus vite !

    https://pixees.fr/quarante-activites-pour-la-quarantaine

  • Les objets connectés, des robots dans nos maisons ?

    Embarquer l’informatique dans les objets a beaucoup d’avantages : simplifier leur fonctionnement, leur donner plus de possibilités d’usage et de sûreté, et leur permettre d’intégrer de nouvelles possibilités à matériel constant par simple modification de leur logiciel.

    TRANSCRIPTION DE LA VIDÉO

    Production 4minutes34 et s24b pour le MOOC SNT de Class´Code, travail éditorial de SNJazur.

    Cette vidéo introduit une des thématiques de l’enseignement en Sciences Numériques et Technologie de seconde au lycée, rendez-vous sur le MOOC SNT pour se former sur ce sujet, en savoir plus sur les notions abordées, les repères historiques, l’ancrage dans le réel, et les activités qui peuvent être proposées.

    En savoir plus :

    Après avoir transformé les chaînes de montage des automobiles et les avions dans les années quatre-vingt-dix, l’informatique intervient maintenant dans des domaines toujours plus nombreux : automobile, réseau ferroviaire et transports urbains, domotique, robotique, loisirs, etc., conduisant à un nouvel internet des objets.

    Pour les avions par exemple, l’informatique gère le vol en commandant finement des servomoteurs électriques, plus légers et plus fiables que les vérins hydrauliques, les réacteurs, la navigation et le pilotage automatique, et permet l’atterrissage automatique par temps de brouillard. Elle a eu un impact décisif sur l’amélioration de la sécurité aérienne.

    Les objets informatisés avaient autrefois des interfaces homme-machine (IHM) dédiées, souvent dépendantes d’une liaison filaire directe. Mais les technologies du Web intégrées au téléphone portable permettent maintenant d’y rassembler les interfaces des objets du quotidien, ce qui en simplifie et uniformise l’usage. Les objets informatisés deviennent ainsi connectés.

     

  • Le numérique pour apprendre le numérique ?

    Présentée par le ministre de l’Éducation nationale comme une innovation majeure pour notre pays  [6], l’introduction de l’enseignement « Sciences numériques et technologie » (SNT) dès la classe de seconde est une des nouveautés de la dernière  rentrée scolaire. En attendant la mise en place prochaine du CAPES Informatique, la question de la formation des enseignant·e·s est cruciale. Et malheureusement une approche uniquement basée sur des formations classiques (cours en présentiel) ne suffit pas pour des raisons de nombre de personnes et de temps disponible. Aussi  des enseignant·e·s-chercheur·e·s ont imaginé pouvoir contribuer à les former en ligne [4] et un élan s’est créé. Nous aimerions partager avec vous cette aventure. Pascal Guitton et Thierry Viéville.

    Ça y est, nos enfants vont enfin  commencer à maîtriser le numérique

    Oui, il a fallu  beaucoup d’attentes et de tergiversations, mais notre pays a enfin enclenché depuis quelques années un mouvement pour enseigner l’informatique à nos enfants, afin de maîtriser et pas uniquement consommer le numérique. Rappelons juste les toutes dernières étapes :

    • 2012 : Un enseignement de spécialité d’Informatique et sciences du numérique (ISN) offre de manière optionnelle aux élèves de terminale de découvrir l’informatique à travers une démarche de projet.
    • 2015 : Un enseignement d’exploration d’Informatique et création numérique (ICN) pour les élèves volontaires de début de lycée là où c’est possible, s’initient de manière créative au numérique et à ses fondements [1].
    • 2019 : Suite à ces réussites, un enseignement en Sciences numériques et technologie  (SNT) se met en place en seconde pour toutes et tous.

    Publié le 4 novembre 2018, le programme de ce dernier enseignement se compose de trois parties principales :  cf. le programme [2] et une analyse de la SIF [3].

    • S : donne une culture scientifique et technique de base en informatique, pour que, par exemple, la notion d’algorithme, le codage de l’information ou le fonctionnement des réseaux prennent du sens ;
    • N : offre à travers sept thématiques (les données, le Web, Internet, la photo numérique, les réseaux sociaux, les objets connectés, la géo-localisation) de comprendre comment ça marche, pour que la technologie prenne du sens, non sans aborder aussi les aspects sociétaux qui sont liés ;
    • T : propose de travailler sur des activités concrètes, de manipulation et de programmation d’objets numériques pour apprendre par le faire, en manipulant l’implémentation de ces notions.

    Et les profs dans tout ça ?

    Mais comme pour toute création d’enseignement, la question de la formation des futur·e·s enseignant·e·s est centrale : apprendre les bases, apprendre comment apprendre ces bases, fournir des ressources (définitions, explications), des exemples de mise de œuvre, et surtout mettre à disposition les outils pour les  échanges et partages entre elles et eux.

    Depuis plus de cinq ans, des dizaines d’enseignant·e·s du secondaire en sciences fondamentales (maths, physique…) ou technologie et bien au-delà (sciences de la vie et de la terre, lettres, économie…) se sont initié·e·s à cette nouvelle discipline et ont commencé à l’enseigner au fil des étapes de la mise en place,  ielles se sont formé·e·s avec les enseignant·e·s-chercheur·e·s des universités et organismes de recherche, et forment aujourd’hui une vraie communauté professionnelle.

    Des ressources aux formations en ligne 

    ©https://classcode.fr/snt une formation en ligne avec des ressources libres et gratuites et réutilisables.

    Pour contribuer à développer ces enseignements dans de bonnes conditions, des communautés enseignant·e·s-chercheur·e·s se sont mobilisées de façon spontanée en plus de leurs missions initiales depuis plusieurs années. Cette mobilisation a pris des formes variées : lobbying amont auprès des décideurs politiques, participation à l’élaboration des programmes, rédaction de manuels, sans oublier bien entendu la question récurrente de la formation des professeur·e·s. Sur ce dernier point, le choix d’une mise à disposition en ligne et d’un accès gratuit à des ressources pédagogiques s’est vite imposé. En effet, on parle de plusieurs milliers de professeur·e·s à aider et organiser des cours en présentiel était hors de portée, tant pour des raisons d’emploi du temps que de financement des déplacements. Par ailleurs, les outils de type plate-forme en ligne offrent des capacités de mise en réseau et de dialogue entre participants sans équivalent avec des « modalités classiques ». Enfin, ces systèmes autorisent une gestion fine du temps consacré à l’apprentissage : disponible 24 h sur 24, ils autorisent un suivi à la carte en fonction des besoins pédagogiques et des disponibilités des enseignant·e·s.

    C’est d’abord une plate-forme documentaire, regroupant des ressources baptisées « grains », qui fut développée en 2012 pour l’option ISN. Ces grains, aux formats divers (cours, articles, textes officiels, livres, ouvrages numériques, logiciels, références historiques ou culturelles…), permettent à l’enseignant·e de parfaire sa formation. Ces ressources sont gardées en archive avec un mécanisme de recherche avancée. Puis, en 2016, le projet Class´Code, grâce à un grand financement public, a permis de faire passer à l’échelle ces efforts divers. Fort de cette expérience, menée avec succès aux dires des acteurs de terrain, des services de type MOOC ont été développés, pour le primaire et le secondaire, pour l’option ICN puis pour l’enseignement SNT.

    Se former de manière hybride tout en travaillant

    Des professeur·e·s pionnier·re·s de l’initiation à l’informatique ©classcode.fr

    Dans quelle mesure peut-on se former en ligne ? L’accès à la formation est gratuite, les ressources sont librement partageables, mais… la ressource rare et très coûteuse est le temps de l’apprenant·e. On constate que si le nombre d’inscrits à un MOOC est en croissance depuis leur apparition en 2011, le pourcentage de personnes allant jusqu’au bout de l’enseignement est assez faible (cf. encadré sur les MOOC).

    Afin d’éviter cet écueil , nous avons abordé le problème autrement en rendant totalement modulaires ces formations en ligne : toutes les ressources sont réutilisables avec les élèves sans attendre que l’enseignant ait terminé de suivre tous les cours. Par ailleurs, ces formations en ligne étaient complétées de temps présentiels en collaboration avec les formations académiques auxquels participaient les enseignant·e·s-chercheur·e·s, qui restaient ensuite au contact, en ligne, pour continuer d’accompagner. Enfin les enseignant·e·s ont pris elles et eux-mêmes en main la création de ressources, coécrit les formations, et ont in fine construit une  communauté, à la fois à travers les plate-formes institutionnelles proposées par l’Éducation nationale et des initiatives tierces de ces collègues.

    Du lycée à la citée : un besoin de formation citoyenne

    Class´Code, formation ICN, une formation citoyenne aux fondements du numérique.

    À ce jour, plus de 28 000 personnes se sont inscrites à la formation ICN [4]. Au-delà des  enseignant·e·s (34 % des inscrit.e.s parmi lesquel·le·s environ 30 % ne sont prédestiné·e·s à enseigner l’option ICN), cette formation très ouverte a touché des salarié·e·s d’une entreprise (14 %) ou de la fonction publique (10 %), des étudiant·e·s (14 %) et des personnes en recherche d’emploi (13 %). Ces chiffres peuvent s’expliquer par le déficit et donc le besoin de culture scientifique et technologique du numérique de notre société.

    La formation SNT était plus spécifique, comme le détaille l’analyse publiée à ce sujet [4].  Plus de 18 000 inscrits après la rentrée (novembre 2019) où la grande majorité des inscrit·e·s appartient au monde de l’enseignement secondaire, et plus de 20 % (quatre fois plus que la moyenne usuelle) d’attestations délivrées, pour former ensuite nos enfants (il est important de rappeler que le nombre d’inscrits à un MOOC ne correspond pas au nombre de personnes ayant accédé, même partiellement, au cours. Environ 20 % à 50 % en moyenne regardent vraiment le contenu, et 1 à 5 % le finissent [5]).

    Et qu’en est-il de nous qui n’avons pas la chance de passer par le lycée d’aujourd’hui, parce que en formation professionnelle ou déjà plus âgé·e·s ? Comme dans cette proposition d’université citoyenne [7], le besoin de formation aux fondements du numérique est probablement une nécessité, tout au long de la vie.

    Les MOOCs

    Ils offrent aux apprenant·e·s une série de contenus, le plus souvent architecturés autour de vidéos d’enseignant·e·s, accompagnés de transparents, ainsi que différentes modalités d’évaluation des connaissances (quizz, questionnaires, exercices…). Par ailleurs, et c’est un des points forts des MOOC, les apprenant·e·s peuvent dialoguer entre elles ou eux, et/ou avec les enseignant·e·s via des forums de discussion ouverts à tout le monde.

    Apparus en 2011 à l’université de Stanford, ces systèmes d’enseignement à distance ont connu une croissance importante. Fin 2018, on dénombrait plus de 100 millions d’inscrits à près de 11 000 cours produits par 900 universités [8].

    Décriés par les uns, encensés par les autres, il n’est aujourd’hui pas possible de les ignorer mais plutôt préférable de les utiliser de façon maîtrisée pour certains types d’enseignement. Parmi leurs principaux avantages, rappelons qu’ils sont accessibles en ligne à tout moment, ce qui ouvre l’accès à des connaissances pour des personnes qui ne sont pas (ou plus) insérées dans un cursus de formation ou bien qui souhaitent suivre des cours construits dans une ville ou un pays où ils ne résident pas. Par ailleurs, leur gratuité renforce la facilité de cet accès. Enfin, ces systèmes sont suffisamment souples pour accueillir différentes approches pédagogiques.

     

    Conclusion

    Pour apprendre à enseigner le numérique, les outils numériques sont vraiment utiles quand ils sont accompagnés, en aval, par des expert.e.s qui se mobilisent pour créer des ressources et, en amont, par des enseignant·e·s qui se mobilisent pour s’en emparer et les vivre collectivement.

    Et si vous enseignez l’informatique aujourd’hui on continue de vous accompagner.

    Pascal Guitton et Thierry Viéville.

    Références :

    [1] Programme ICN

    [2] Programme SNT

    [3] Analyse du programme SNT par la SIF

    [4] Peut-on former des enseignants en un rien de temps ?

    [5] By the numbers: MOOC in 2018, ClassCentral

    [6] Science informatique et numérique : quelle est cette nouvelle discipline  » innovation majeure pour la France » selon Jean-Michel Blanquer ?

    [7] Apprentissage de la pensée informatique : de la formation des enseignant.e.s à la formation de tou.te.s les citoyen.ne.s

    [8] Mooc year in review 2018

  • Femmes et Sciences : et si c’était une affaire de mecs ?

    Pour lutter contre la désaffection des jeunes pour les sciences, garçons et filles, les associations Parité Science et Femmes & Sciences et plusieurs partenaires ont pris le temps, le 9 novembre 2019, de faire le point sur l’égalité filles et garçons face à l’enseignement des sciences et à l’orientation scolaire dans notre pays, ainsi qu’aux sciences comme moteur d’intégration sociale, notamment grâce aux outils numériques. Pour partager quelques éléments clés, faisons l’interview imaginaire d’un petit garçon. Thierry Viéville.

    Source et Copyright  Parité Science et Femmes & Sciences 

    Binaire : Bonjour Léandre, peux-tu citer le nom d’une femme scientifique ?

    Léandre : Oui oui : « Isabelle Martin ».

    Binaire : Ça alors ! Tu sais que la plupart des personnes auraient répondu « Marie Curie », c’est souvent la seule qu’on connaît parmi toutes les femmes scientifiques.

    Léandre : Certes, mais ma sœur m’a expliqué que ça pose problème parce que si le seul modèle pour les filles qui veulent faire de la science est une personne complètement extraordinaire, alors elles vont se dire, que bon, je suis pas aussi excellente que Marie Curie, donc je n’ai aucune chance.

    Binaire : Ah oui tu as raison, mais tu sais : je ne connais pas Isabelle Martin moi.

    Léandre : Ben moi non plus, hihihi, mais ma sœur a fait un calcul de probabilité. Et comme Isabelle et Martin sont les prénoms et patronymes les plus courants, y’a quasiment aucune chance qu’il n’y ait pas une femme scientifique qui se nomme ainsi. C’est sûrement une personne ordinaire, qui a juste envie d’être chercheuse parce que cela lui plaît.

    Binaire : Ah oui ! Mais dis moi pourquoi les filles s’autocensurent vis à vis des sciences ? Tu as vu par exemple avec la création du nouvel enseignement Numérique et science informatique qui permet enfin de s’initier à cette science récente et omniprésente avec tant de débouchés, il y a vraiment très peu de filles qui ne se sont pas autocensu…

    Léandre : Hein ?!?!! A.u.t.o.-C.e.n.s.u.r.e. Faut arrêter là, non mais tu réalises pas … c’est de la censure sociale omniprésente dont on parle ici. Regarde, par exemple ça :

    Source : Isabelle Collet Inclusion des filles dans l’enseignement en informatique, quelles bonnes pratiques ? On y trouvera d’autres « perles » sexistes de 2019 et une analyse de ce matraquage social permanent.

    Comme nous l’explique Isabelle Collet :

    « On invite les filles à faire de la science au niveau européen ? C’est à travers un clip rempli d’un ramassis de clichés ! Barbie est (enfin !) informaticienne ? Elle s’occupe du graphique pendant que son mec fait la techno, comme vous l’aviez dénoncé sur binaire. Et mon horreur préférée est devant toi… regarde ces mappemondes. On en fait une rose pour les filles » . Seraient-elles trop c…s (avec 2 ‘n’) pour utiliser celles « réservées aux garçons » ? « Le fait de produire une mappemonde rose pour attirer les filles rend la bleue masculine, alors qu’elle était jusque là “normale”. De ce fait, les trucs normaux c’est pour les garçons, tandis que pour ces pauvres filles faut adapter… ».

    Dès la naissance on commence à les traiter de manière biaisée. Donc NON : y a PAS d’autocensure des filles, y’a juste des filles qui finissent par baisser la tête devant la censure sociale, à force d’être exclues implicitement et très concrètement, comme le montre par exemple cette étude https://www.elephantinthevalley.com de 2015, actualisée en 2018.

    Binaire : Tu exagères Léandre, les filles comme les garçons peuvent par exemple accéder aux revues scientifiques de vulgarisation.

    Léandre : Ah ben parlons en, tiens, justement ! Regarde :

    Source : Clémence Perronnet- L’accès aux sciences en question : le poids des inégalités sociales. On y trouvera une synthèse en matière d’analyse sociologique de ce mécanisme d’exclusion.

    Regarde bien, comme l’a étudié Clémence Perronnet, « sur 110 couvertures, les 4 femmes sont : (i) un robot, (ii) une statue, (iii) une surfeuse et (iv) une pauvre femme effrayée par les extra-terrestres », avec ça… vazy d’être incitée à faire de la science.

    Et tu sais,  il a fallu attendre 1975 (la loi Haby) pour que l’enseignement soit le même pour les filles et les garçons. Oui oui,  avant , tout l’enseignement était différencié et parfois sexiste comme l’illustre cet exemple donné par la même autrice :

    Binaire : Heureusement les choses progressent…

    Léandre : Oui et non. Indéniablement oui à plusieurs niveaux, et c’est le résultat d’un véritable combat citoyen plus que centenaire. Mais dans plusieurs domaines et dans nos esprits, le chemin à parcourir reste long, comme on le voit ici pour les maths https://tinyurl.com/wjkgcro et comme c’est le cas en informatique où il y a même une régression. Il faudrait que les mecs se bougent un peu sur le fond.

    Binaire : Attends, tu soulèves un point dont je voudrais parler en toute franchise.  Beaucoup d’hommes se sentent concernés voire sont acteurs de la parité, comme dans le projet Class´Code. Mais sont parfois « piégés », juste sur un mot, une parole maladroite et paf ! le ou les voilà catalogués « vilain sexiste » alors que  la personne agit pour l’égalité avec les meilleures intentions. Tu crois qu’il serait plus pédagogique de nous aider sans nous condamner d’emblée ?

    Léandre : Oui, tu as raison, pas facile pour un homme de trouver sa place dans la lutte pour l’égalité… D’abord, il faut comprendre que les inégalités sont le produit du système de genre qui hiérarchise les hommes et les femmes et crée entre eux un rapport de domination.
    Ce n’est pas la même chose d’agir pour l’égalité depuis la position dominante et depuis la position dominée : les hommes – qui sont du bon côté du rapport de force – ne sont jamais légitimes quand ils demandent aux femmes d’être « gentilles » dans leur lutte : la colère des opprimées est justifiée. Se battre contre des siècles d’histoire et toute la force des institutions, ça demande beaucoup d’efforts !
    Là où tu as raison, c’est qu’à l’échelle individuelle et dans nos relations personnelles, la bienveillance, la pédagogie et l’humour sont nécessaires pour faire mieux et progresser, hommes et femmes ensemble.

    Binaire : Ah oui je comprends mieux maintenant, et cela porte ses fruits ?

    Léandre : Oui au-delà d’« activités pour les filles » qui permettent de corriger un peu les conséquences, au niveau individuel la priorité est d’éduquer les garçons, à l’égalité des sexes, Isabelle Collet parle encore d’équité*.

    Et au niveau structurel, il y a des mesures vraiment efficaces qui agissent sur les causes. Elles sont validées parce que des chercheurs et chercheuses en psychologie, sociologie et science de l’éducation étudient scientifiquement le sujet. Par exemple s’imposer plus d’enseignantes dans les études supérieures scientifiques. Introduire une vraie information et formation sur le système de genre. Ou encore imposer temporairement une « discrimination positive » à l’embauche qui ne fait que compenser la vraie discrimination négative de la société, jusqu’au rétablissement d’une équité.

    Binaire : C’est donc la science qui peut aider à permettre que les deux moitiés de l’humanité profitent de la science alors ?

    Léandre : Et oui, la boucle est bouclée.

    Contenus et relecture de Clémence Perronnet et Isabelle Collet, avec la complicité de « Léandre ».

    Pour en savoir plus:

    Collet, I. (2019). Les oubliées du numérique, 2019, Eds le Passeur
    Collet, I. (2018). Dépasser les éducations à : vers une pédagogie de l’égalité en formation initiale du personnel enseignant. Recherches féministes, 31(1), 179-197.
    Perronnet, C. (2019).  L’accès aux sciences en question : le poids des inégalités sociale https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-02320453
    Perronnet, C. (2019). Filles et garçons face aux mathématiques à l’école primaire : le genre influence-t-il les apprentissages ?. Des enfants chercheurs.. à l’école des maths, Fédération Nationale des Associations de Maîtres E, Oct 2019, Niort, France
    Perronnet, C. (2018) Scientifiques de pixels et scientifiques en herbe : Les images des sciences et leur rôle dans l’élaboration des représentations enfantines en milieux populaires. Revue GEF (Genre Éducation Formation).
    Siméone C. (2019)  Voici deux méthodes pour augmenter le nombre de femmes qui travaillent dans le numérique.

    (*) Égalité/Équité des sexes/genres , quelques précisions:
    – « sexes » ou  « genres » : puisque l’objectif est l’égalité entre les êtres humains quelles que soient leurs caractéristiques biologiques (organes génitaux) nous parlons bien de sexe, de l’abolition du processus social de hiérarchisation des données biologiques dans la production d’une bi-catégorisation sociale (qui correspond au genre = féminin/masculin). Pour atteindre l’égalité des hommes et des femmes, il faut déconstruire le genre, c’est-à-dire les concepts de féminin et masculin qui sont historiquement inégalitaires. Le genre étant défini comme la bi-catégorisation hiérarchisée des sexes, une « égalité des genres » est un oxymore.
    – « égalité » ou « équité » : le débat est complexe car tout le monde n’attribue pas le même sens à ces mots. Dans le vocabulaire des SHS la notion d’équité implique une correction des inégalités, alors que la notion d’égalité suppose la non-production d’inégalités (à ne pas confondre avec « égalité des chances »), on va donc choisir égalité ou équité selon que l’on parle de l’abolition des inégalités ou de la compensation de leur permanence.

     

  • Géolocalisation, comment s’y retrouver ?

    La cartographie est essentielle pour beaucoup d’activités : agriculture, urbanisme, transports, loisirs, etc. Elle a été révolutionnée par l’arrivée des cartes numériques accessibles depuis les ordinateurs, tablettes et téléphones, bien plus souples à l’usage que les cartes papier.

    Les cartes numériques rassemblent toutes les échelles et permettent de montrer différents aspects de la région visualisée sur une seule carte. Les algorithmes de recherche permettent de retrouver sur la carte les endroits en donnant simplement leur nom, et de calculer des itinéraires entre points selon des modes de transports variés.

    TRANSCRIPTION DE LA VIDÉO

    Production 4minutes34 et s24b pour le MOOC SNT de Class´Code, travail éditorial de SNJazur.

    Cette vidéo introduit une des thématiques de l’enseignement en Sciences Numériques et Technologie de seconde au lycée, rendez-vous sur le MOOC SNT pour se former sur ce sujet, en savoir plus sur les notions abordées, les repères historiques, l’ancrage dans le réel, et les activités qui peuvent être proposées.

  • Des pistes pour sortir de la crise de l’enseignement des sciences

    La conférence de clôture des Journées Nationales de l’APMEP (Association des Professeurs de Mathématiques de l’Enseignement Public) à Bordeaux (2018) a été l’occasion pour Gilles Dowek de livrer un plaidoyer pour l’enseignement des sciences de l’école au lycée. Cet article en reprend les idées principales. Gilles Dowek est chercheur et enseignant en informatique à l’INRIA et à l’ENS de Paris-Saclay. Il a milité activement pour l’introduction de l’algorithmique et plus généralement de l’informatique dans les programmes scolaires et pour la création du CAPES d’informatique.

    Ce texte est paru dans la revue Au Fil des Maths de l’APMEP.

    Une situation favorable

    La révolution informatique que nous sommes en train de vivre est l’une des plus grandes révolutions scientifiques et techniques de l’histoire, qui transforme nos métiers, nos institutions, notre manière de communiquer avec nos proches… Elle s’appuie, bien entendu, sur les progrès de l’informatique, qui existe en tant que science structurée depuis les années 1930, mais aussi sur ceux des autres sciences, en particulier de la physique — par exemple de la physique des semi-conducteurs — et des mathématiques — par exemple de la théorie des nombres, sur laquelle repose une grande partie de la cryptologie. En retour, elle transforme toutes les sciences, métamorphosant l’instrumentation : le séquençage du génome humain, la découverte du boson de Higgs ou la démonstration du théorème de Hales étaient impossibles sans ordinateur. Elle transforme aussi les conditions de vérité d’un énoncé et les langages dans lesquels les sciences « dures » comme « humaines » s’écrivent : l’invention des langages de programmation, au XXe siècle, est une rupture aussi radicale que l’invention du langage de l’algèbre, au XVIe siècle.

    La situation n’a donc jamais été aussi favorable pour enseigner les sciences et les techniques. Les élèves et les étudiants devraient se précipiter dans les cours de sciences, qui devraient être au centre du projet pédagogique de l’école, du collège et du lycée.

    Il est donc paradoxal que l’enseignement des sciences soit aujourd’hui en crise. Pourtant cette crise est réelle et un certain nombre d’indices l’atteste.

    Le constat d’une crise

    Un premier indice est l’absence de culture scientifique de nos représentants, qui ont pourtant été à l’école avant d’avoir été élus ou fonctionnaires.

    Alors que les sciences transforment le monde, ceux qui l’administrent ignorent parfois la différence entre un virus et une bactérie, un losange et un parallélogramme, un programme impératif et un programme fonctionnel.

    Plutôt que leur jeter la pierre, nous devrions proposer que les écoles qui les forment — par exemple, à l’heure actuelle, l’École Nationale d’Administration — mettent la formation scientifique de leurs étudiants au centre de leur projet pédagogique.

    Un autre indice de cette crise est la difficulté que nous avons à enseigner les sciences à l’école primaire. Ici aussi, une remédiation possible est de mettre la formation scientifique des étudiants au centre du projet pédagogique des écoles du professorat.

    Mais le symptôme le plus inquiétant de cette crise est sans doute la place des sciences dans la réforme du lycée qui se met en place en cette rentrée 2019. Si l’idée de proposer aux élèves de choisir leurs cours dans un vaste catalogue et de construire eux-mêmes leur projet d’étude est bonne, ainsi que celle de garantir, par un tronc commun, l’acquisition par toutes et tous de savoirs fondamentaux, cette réforme nous renseigne sur la singulière vision que ses concepteurs ont des savoirs fondamentaux : sur les seize heures de tronc commun du programme de première générale, deux heures sont consacrées au sport, et les quatorze heures qui restent sont réparties en deux heures pour les sciences et douze heures pour les humanités. En fonction du choix des spécialités, la part des humanités varie donc entre 43 % et 86 %, quand la part des sciences varie entre 7 % et 50 %. Comme à l’époque des séries L, ES et S, les élèves ont donc le choix entre un enseignement entièrement consacré aux humanités et un enseignement équilibré entre les humanités et les sciences.

    Le projet pédagogique du lycée reste donc fondamentalement le même : celui d’une domination des humanités. Ce projet est totalement anachronique, quand le reste du monde vit une révolution scientifique et technique sans précédent.

    Des pistes pour une résolution de la crise

    Plusieurs pistes permettent d’entrevoir une solution à cette crise. La première est bien entendu de revendiquer un équilibre des sciences et des humanités dans le tronc commun du lycée. Bien plus que la place des mathématiques, c’est la place des sciences dans leur ensemble qu’il convient de défendre, par exemple, en proposant un tronc commun constitué de sept heures consacrées aux humanités et de sept heures consacrées aux sciences. La part des humanités varierait alors de 25 % à 68 %, et la part des sciences également.

    Mais, bien entendu, la solution ne peut venir de la revendication seule, et nous devons aussi nous demander ce que nous pouvons changer nous-mêmes pour résoudre cette crise. Deux pistes sont ici à explorer : la réconciliation des sciences et des techniques et le dialogue des sciences avec les humanités.

    L’incroyable difficulté à faire de l’informatique une discipline à part entière avec ses programmes, ses horaires et ses enseignants — un CAPES d’informatique a été créé en 2019, alors que les premières revendications d’un tel CAPES datent des années 1970, soit il y a presque un demi-siècle — a des causes multiples.

    L’une d’elles, qui n’est sans doute pas la principale, mais qui n’en reste pas moins paradoxale, a été l’inertie opposée par les enseignants des autres sciences, notamment de mathématiques, qui ont perçu en l’apparition d’une nouvelle discipline un risque de voir leur horaire amputé. Il est regrettable que ces enseignants n’aient pas perçu que l’extraordinaire opportunité que constitue un enseignement de l’informatique pour amener des élèves vers les sciences, et donc les mathématiques, compensait, de beaucoup, ce risque d’une diminution des horaires consacrés aux mathématiques. En particulier, un grand nombre de notions mathématiques sont utilisées en informatique : par exemple, la notion de coordonnée cartésienne en traitement d’image et, plus spécifiquement, la notion de projection pour la représentation en perspective des objets tridimensionnels. Se saisir de cette opportunité pour enseigner ces notions ne consiste pas à évoquer brièvement, dans des activités d’approche, l’utilité de la notion de coordonnée en traitement d’image, avant d’aborder le vif du sujet, mais à transformer entièrement l’enseignement de la notion de coordonnée, dans un projet multidisciplinaire, proposé conjointement par des enseignants de mathématiques et d’informatique. Par delà ces notions déjà enseignées, l’enseignement de l’informatique permet de renouveler l’enseignement des mathématiques en introduisant de nouvelles notions, en logique, en combinatoire, en théorie des nombres, en théorie des graphes…

    La réconciliation des sciences et des techniques est également essentielle, car la première perception que les jeunes élèves ont des questions scientifiques est médiatisée par des objets techniques — ils conçoivent la notion de voiture avant celle de combustion des alcanes. Si les enseignants de mathématiques, et plus généralement les mathématiciens, ont heureusement, pour la plupart, abandonné l’idée selon laquelle la beauté des mathématiques réside dans leur inutilité, l’enseignement des sciences reste trop coupé de celui des techniques. Il est certes possible, sur le plan philosophique, de distinguer un résultat scientifique — l’établissement de la vérité d’un énoncé — d’un résultat technique — la production d’un objet, tels un avion ou un programme. Il est en revanche impossible, sur le plan historique, de séparer le développement des sciences de celui des techniques. L’enseignement de la physique, par exemple, peut nous laisser croire que le développement de la thermodynamique a été indépendant ou a précédé celui de la machine à vapeur, mais c’est oublier que le second principe de la thermodynamique a été énoncé par Sadi Carnot dans un texte intitulé Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance. En particulier, il est urgent d’abandonner l’idée que les sciences sont du domaine de l’abstrait / du cerveau, quand les techniques relèvent du concret / de la main. Il n’y a rien de plus abstrait qu’un programme, qui reste cependant un objet technique.

    Renouer le dialogue avec les humanités est aussi essentiel, car la révolution scientifique et technique que nous vivons est aussi celle des sciences humaines. L’hostilité des enseignants de français, de philosophie, de langues et d’histoire-géographie serait moindre si nous dialoguions davantage avec eux et s’ils comprenaient, eux aussi, l’importance pour leurs élèves d’avoir une formation scientifique. Deux pistes méritent d’être explorées dans ce dialogue : la transformation de la méthode des sciences humaines qui disposent désormais de données massives et d’outils de modélisation. Par exemple, un professeur d’anglais, au lieu de donner à ses élèves les listes des adjectifs dont le comparatif se construit avec le suffixe « -er » et avec l’adverbe « more », peut leur donner un corpus formé d’un assez grand nombre de textes et les laisser construire ces listes eux-mêmes, dans un projet interdisciplinaire. Une autre piste à explorer est l’incorporation de l’histoire des sciences et des techniques dans les programmes d’histoire — la révolution galiléenne et la place que les mathématiques et l’expérimentation ont prise dans la science au XVIIe siècle pourraient constituer un chapitre entier d’un cours d’histoire moderne. La même chose pourrait être dite de l’éthique, dont les questions ont été complètement renouvelées par la révolution scientifique et technique que nous vivons. Peut-on / doit-on chiffrer ses courriers ? Voilà une question qui pourrait mobiliser non seulement les enseignants d’informatique et de mathématiques, mais aussi de philosophie.

    Plus profondément, même en admettant que le but de l’École soit d’apprendre aux élèves « à lire et à écrire », nous pourrions nous entendre sur le fait que lire et écrire ne consiste pas uniquement à lire et écrire des textes exprimés dans des « langues », mais aussi des textes exprimés dans des « langages », tels les équations, les programmes, les formules développées des molécules, les figures géométriques, les partitions…

    Gilles Dowek

    Dernier livre paru de Gilles Dowek : Ce dont on ne peut parler il faut l’écrire — Langues et langages (Le Pommier, 2019).

  • Réseaux sociaux, le monde est-il si petit ?

    Les réseaux sociaux sont des applications basées sur les technologies du Web qui offrent un service de mise en relation d’internautes pour ainsi développer des communautés d’intérêts.

    TRANSCRIPTION DE LA VIDÉO

    Production 4minutes34 et s24b pour le MOOC SNT de Class´Code, travail éditorial de SNJazur.

    Cette vidéo introduit une des thématiques de l’enseignement en Sciences Numériques et Technologie de seconde au lycée, rendez-vous sur le MOOC SNT pour se former sur ce sujet, en savoir plus sur les notions abordées, les repères historiques, l’ancrage dans le réel, et les activités qui peuvent être proposées.

  • Internet, IP un protocole universel ?

    Grâce à sa souplesse et son universalité, internet est devenu le moyen de communication principal entre les hommes et avec les machines.

    TRANSCRIPTION DE LA VIDÉO

    Production 4minutes34 et s24b pour le MOOC SNT de Class´Code, travail éditorial de SNJazur.

    Cette vidéo introduit une des thématiques de l’enseignement en Sciences Numériques et Technologie de seconde au lycée, rendez-vous sur le MOOC SNT pour se former sur ce sujet, en savoir plus sur les notions abordées, les repères historiques, l’ancrage dans le réel, et les activités qui peuvent être proposées.

  • Le web, site internet ou site web ?

    Le Web (toile ou réseau) désigne un système donnant accès à un ensemble de données (page, image, son, vidéo) reliées par des liens hypertextes et accessibles sur le réseau internet.

    TRANSCRIPTION DE LA VIDÉO

    Production 4minutes34 et s24b pour le MOOC SNT de Class´Code, travail éditorial de SNJazur.

    Cette vidéo introduit une des thématiques de l’enseignement en Sciences Numériques et Technologie de seconde au lycée, rendez-vous sur le MOOC SNT pour se former sur ce sujet, en savoir plus sur les notions abordées, les repères historiques, l’ancrage dans le réel, et les activités qui peuvent être proposées.

  • Photographie numérique, du réel aux pixels ?

    Les technologies de la photographie argentique ont eu une évolution très lente, liée aux progrès en optique, mécanique et chimie. Ce n’est plus du tout le cas de l’évolution actuelle, davantage due aux algorithmes qu’à la physique : algorithmes de développement et d’amélioration de l’image brute, algorithmes d’aide à la prise de vue. Cet exemple est caractéristique des façons de procéder de la révolution informatique par rapport aux approches traditionnelles.
    La photographie numérique présente un coût marginal très faible et une diffusion par internet facile et immédiate : chaque jour, des milliards de photos sont prises et partagées.

    TRANSCRIPTION DE LA VIDÉO

    Production 4minutes34 et s24b pour le MOOC SNT de Class´Code, travail éditorial de SNJazur.

    Cette vidéo introduit une des thématiques de l’enseignement en Sciences Numériques et Technologie de seconde au lycée, rendez-vous sur le MOOC SNT pour se former sur ce sujet, en savoir plus sur les notions abordées, les repères historiques, l’ancrage dans le réel, et les activités qui peuvent être proposées.

  • Données, comment les manipuler ?

    Les données constituent la matière première de toute activité numérique. Afin de permettre leur réutilisation, il est nécessaire de les conserver de manière persistante. Les structurer correctement garantit que l’on puisse les exploiter facilement pour produire de l’information. Cependant, les données non structurées peuvent aussi être exploitées, par exemple par les moteurs de recherche.

    TRANSCRIPTION DE LA VIDÉO

    Production 4minutes34 et s24b pour le MOOC SNT de Class´Code, travail éditorial de SNJazur.

    Cette vidéo introduit une des thématiques de l’enseignement en Sciences Numériques et Technologie de seconde au lycée, rendez-vous sur le MOOC SNT pour se former sur ce sujet, en savoir plus sur les notions abordées, les repères historiques, l’ancrage dans le réel, et les activités qui peuvent être proposées.

  • Science numérique et technologie pour tou·te·s ! Oui mais comment ?

    Faire de la pub pour un Mooc à destination des profs de Sciences Numériques et Technologie dans un magazine grand public comme Binaire. Ils sont devenus fous chez Binaire ? Non ! D’abord, nous voulons vous sensibiliser à un problème qui nous obsède : quand on décide d’enseigner l’informatique massivement dans l’éducation nationale, comment fait-on pour former les enseignants déjà en poste ? Les MOOC peuvent aider. Ensuite, nous pensons que certains lecteurs de Binaire seront intéressés par ce MOOC sans pour autant avoir à enseigner. Tout le monde peut découvrir l’informatique, femme ou homme, jeune ou vieux. Si vous vous sentez frustré.e.s par votre méconnaissance de cette nouvelle science, nous vous invitons à suivre ce MOOC. Serge Abiteboul, Thierry Viéville.

    Dans le cadre de la réforme du lycée, l’enseignement des fondements de l’informatique prend une place importante. Ainsi dès la classe de Seconde générale et technologique, un nouvel enseignement, Sciences Numériques et Technologie (SNT), est proposé à toutes et à tous.

    Comment aider les enseignants de SNT ? Quels savoirs partager avec eux ? Quelles ressources sélectionner ? Quelles compétences leur transmettre pour qu’ils puissent assurer ce nouvel enseignement ?

    Une réponse à ces questions : un MOOC [1] pensé comme un outil de formation un peu particulier, un espace de partage et d’entraide, où chacune et chacun construira son parcours selon ses besoins et ses connaissances, un cours en ligne qui va évoluer avec le temps ; on commence quand on veut (dès le 15 mars 2019) et on y revient aussi souvent qu’on en a besoin.

    Ce cours a pour ambition de fournir des prérequis et des premières ressources pour démarrer des activités en SNT avec les lycéens en lien avec les 7 thématiques du programme. Des gros plans sur quelques sujets qui peuvent faire l’objet d’approfondissement et des activités clés en main seront proposés. Ce MOOC vient aider et complémenter les formations nécessaires à cet enseignement que propose l’éducation nationale.

    Pour accéder à plus d’informations sur le programme du cours et vous inscrire dès maintenant rendez-vous sur la plateforme FUN.

    Début du cours le 15 mars 2019.

    Ce cours est proposé par Inria en collaboration avec de nombreux contributeurs, avec le soutien du Ministère de l’Éducation Nationale et de la Jeunesse et en partenariat avec Class’ Code.

    On vous attend nombreux !

    A bientôt.

    L’équipe du MOOC SNT

    Ce billet a été publié sur pixees.fr, merci de leur partage.

    (*) MOOC, Massive Open Online Courses, se traduit en bon français en FLOT pour Formation en Ligne Ouverte à Tous.

    [1] créés en 2011, les MOOC offrent un ensemble de ressources pédagogiques de natures très différentes (vidéos, transparents, sous-titres, audios…) qui sont gratuitement mises à disposition  des participants via le web. Il suffit donc de s’inscrire sur une plate-forme (FUN, OpenClassrom, Cursera, EdX…), puis de suivre les contenus à son propre rythme. Par ailleurs, et ce n’est pas le moins important, les MOOC sont accompagnés d’un ensemble de forums où les participants et les enseignants peuvent échanger, se poser des questions, apporter des éclairages complémentaires.