Catégorie : Actualité

  • Happy Birthday Professor Boole

    Binaire a failli être pris au dépourvu ! Mais le 2 novembre 2015 ne s’achèvera pas sans que nous célébrions l’anniversaire d’un scientifique sans lesquels l’informatique n’aurait pas pu exister. Ca, pour l’Histoire. Et pour l’histoire, quelqu’un dont le nom est devenu un adjectif connu de millions d’étudiants et d’étudiantes.

    Toute étudiante d’informatique doit un jour travailler son algèbre de Boole. Celle-ci est utilisée quand elle écrit un algorithme et qu’elle doit combiner des conditions pour sortir d’une boucle ou gérer une conditionnelle. La même algèbre permet d’organiser des requêtes complexes en bases de données. Et surtout, elle permet de comprendre l’architecture des ordinateurs : si les 0 et les 1 pour tout décrire on le doit plutôt à Leibnitz, le fait que ces mêmes 0 et les 1 peuvent servir à tout calculer, ça c’est à George Boole qu’on le doit.

    George Boole, ca. 1860, wikimedia commons
    George Boole, ca. 1860, wikimedia commons

    Informatiquement, le calcul Booléen se substitue à tous les autres calculs : il suffit (!) alors d’imaginer une façon de réaliser physiquement les portes de base qui combinent un bit (valant 1 ou 0, vrai ou faux) et un second bit pour redonner un 1 ou un 0…

    Quelques portes logiques. wikipedia commons
    Quelques portes logiques. wikipedia commons

    George Boole est né le 2 novembre 1815. 200 ans plus tard ses idées sont présentes dans tous les objets numériques que nous manipulons.

    Il a son cratère sur la lune et est un possible modèle pour le Professeur Moriarty. Et il est devenu un adjectif qualificatif, ce qui est tout de même rare !

    Happy Birthday, Goeorge Boole.

    Pour en savoir plus :

  • Open Access : En avant !

    On parle beaucoup d’open access en ce moment notamment avec un article très disputé de la Loi pour une République Numérique. Nous fêtons du 19 au 25 octobre l’Open Access Week, la semaine du libre accès, « un événement annuel du monde scientifique marqué par l’organisation de multiples conférences, séminaires ou annonces sur le thème du libre accès et sur le futur de la recherche académique dans de nombreux pays. » L’open access des résultats de la recherche académique, notamment quand elle est subventionnée par l’état, semble une évidence. À l’heure du Web, c’est pourtant loin d’être la règle. Laurent Romary, chercheur chez Inria, aborde le sujet. Serge Abiteboul.

    Le libre accès (en anglais : open access) est la mise à disposition en ligne de contenus numériques, qui peuvent eux-mêmes être soit libres (Creative commons, etc.), soit sous un des régimes de propriété intellectuelle. L’open access est principalement utilisé pour les articles de revues de recherche universitaires, sélectionnés par des pairs… Wikipedia 2016.

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    Le logo de l’open-access : une image … en accès libre !

    La semaine de l’accès libre doit être aussi celle de la pensée libérée. Alors que le sujet n’a jamais été aussi prégnant dans les agendas politiques avec la discussion sur la loi pour une République Numérique et son fameux article 9 sur le « Libre accès aux publications scientifiques de la recherche publique », on peut essayer d’identifier qui a la maîtrise conceptuelle des débats. La lecture du projet d’article laisse perplexe. On ne peut que se féliciter que l’open access soit mentionné explicitement dans la loi et que la notion de « Commun », essentielle en particulier dans l’activité scientifique, apparaisse en tant que telle. Mais tout reflète ici une vision guidée par les vieux mécanismes de l’édition privée, pour ne pas dire papier. On sourirait presque à la référence faite à une parution d’« au moins une fois par an » alors que les journaux électroniques (et libres) modernes publient de plus en plus souvent au fil de l’eau, article par article. On grince à la lecture que des contraintes peuvent peser sur le manuscrit auteur alors que le chercheur et ses confrères chargés de la relecture ont été les seuls à fournir une création de l’esprit. On se désole de voir repris la notion d’embargo (i.e. de « délai de publication ouverte  »), inventée par l’édition commerciale et qui limite la diffusion des savoirs au moment même où cette diffusion serait la plus utile : le temps de l’expression des idées. On ne doute plus avec la dernière phrase dont le seul but est qu’ « aucune exploitation commerciale » ne puisse avoir lieu, alors que l’on souhaite évidemment que les contenus scientifiques (indépendamment de leur forme écrite) soient le plus vite possible des générateurs de prospérité scientifique, sociétale et économique, comme le demande d’ailleurs explicitement la puissance publique qui, faut-il le rappeler, finance une grande partie de la recherche.

    Dans le même temps, on assiste à cette même perte de maîtrise de l’agenda au niveau européen avec des prises de position très conservatrices prises par des institutions telles que la société Max Planck en Allemagne ou exprimées dans des rapports officiels en Angleterre. On semble se précipiter dans les bras du modèle auteur-payeur là aussi inventé par l’édition privée, qui présente tous les risques de coûter au milieu académique bien plus cher que les abonnements eux-mêmes.

    Les chercheurs sont perdus. Il ne savent plus à quel modèle se vouer. Quels droits ont-ils de déposer dans des archives ouvertes telles que HAL ou arXiv alors qu’un éditeur comme Elsevier change régulièrement de politique rendant celle-ci illisible ? Doivent-ils tout aussi bien se laisser tenter par les miroirs aux alouettes que sont Mendeley, Academia ou Research Gate, dont les perspectives économiques ne sont pas nécessairement compatibles avec les besoins de la communication et de la préservation des communs de la science ? Doivent-ils simplement obtempérer quand on leur demande dans le cadre de modèles dits hybrides (*) de payer pour que leur article de revue scientifique soit en « open access » à la date de publication ?

    Que faire alors ? Probablement travailler à l’identification du modèle que l’on souhaite vraiment mettre en œuvre pour favoriser la diffusion libre des savoirs.

    http://www.episciences.org une plateforme pour réaliser des revues à moindre coût et de mettre en œuvre le libre accès aux versions électroniques des articles.

    De quoi parle-t-on ? De mécanismes de communication scientifique que les chercheurs et leurs institutions ont choisis et dont ils possèdent l’entière maîtrise, notamment pour décider des conditions de diffusion et de réutilisation des contenus. De plates-formes de publications qui dépendent de la force publique, et dont les services ne peuvent être délégués que dans un cadre réellement concurrentiel. De la possibilité de pouvoir — enfin — prendre toute la dimension du passage au tout numérique et de voir s’il est possible de communiquer les résultats de recherche autrement : nouveaux modes de qualification et de certification, impact sur les (et symétriquement, des) réseaux sociaux, prise en compte des données de recherche, nouveaux indices d’impact ou de notoriété.

    Un doux rêve ? Il semble que certaines institutions ont décidé d’agir dans ce sens. Pour preuve, Inria, forcément bien placée pour comprendre les défis du numérique, demande à tous ses chercheurs de communiquer autrement :

    • un article de recherche est pris en compte dans l’évaluation d’une équipe uniquement s’il est disponible en accès libre dans le système public HAL,
    • le modèle hybride de financement des publications doit être refusé,
    • et enfin, l’institut encourage des contributions à la définition et à la vie de nouveaux journaux qui reposent sur des plates-formes publiques telles qu’Episciences.org.

    Le message est clair : les chercheurs doivent mettre leurs productions scientifiques au service de toutes et tous !

    Ce qui est possible chez Inria l’est-il plus largement dans d’autres institutions et dans la communauté de recherche au sens large ? Cette semaine de l’open access est-elle celle du conservatisme vis-à-vis des modèles existants ou celle de la créativité et du courage ?

    Laurent Romary, Inria.

    Pour ce qui est de la Loi sur la République numérique, Binaire soutient la proposition d’Inria.

    (*) Modèle hybride : la revue est diffusée de façon traditionnelle sur abonnement, mais l’auteur d’un article peut également payer pour que celui-ci soit disponible en accès libre. Les chercheurs paient donc deux fois : pour publier et pour accéder.

    Pour aller plus loin :

     

  • C’est la fête !

    logo_fete_de_la_science_459382Depuis 24 ans maintenant, durant toute une semaine, la science est à la fête partout en France. Avec plus d’un million de visiteurs, 7000 chercheurs impliqués et un foisonnement d’animations, d’expositions, de débats et d’initiatives originales, partout en France et pour tous les publics, la Fête de la science est une occasion de découvrir le monde des sciences et de rencontrer des scientifiques. Les sciences du numérique ne sont pas en reste, avec les multiples initiatives proposées par les établissements de recherche comme par exemple celles du CNRS et ou celles d’Inria que Marie-Agnès Enard a choisi de vous inviter à découvrir.

    Bordeaux – Sud Ouest : Circuit scientifique bordelais

    Dans le cadre du Circuit scientifique bordelais, les structures d’enseignement supérieur et de recherche et leurs laboratoires ouvrent leurs portes du 5 au 9 octobre, en proposant des ateliers ludiques aux élèves du primaire à l’université. C’est l’occasion de venir découvrir le monde passionnant de la recherche et les activités des scientifiques dans de nombreuses disciplines. Au centre Inria Bordeaux – Sud-Ouest, chercheurs et ingénieurs accueilleront les élèves de tous les niveaux et de toute l’académie pour leur transmettre leur passion pour les sciences du numérique. Pour vous inscrire, suivez le lien.

    Grenoble – Rhône Alpes  : Portes ouvertes aux lycéens !

    Inria Grenoble ouvre ses portes aux lycéens les 8 et 9 octobre pour une immersion dans le monde des sciences du numérique. Au programme : parcours de visite augmentée du centre de recherche, découverte de plateformes d’expérimentations, habitat intelligent, capture et modélisation de formes en mouvement, initiation aux notions de l’informatique par des activités ludiques sans ordinateurs, cryptologie et protection de messages, dialogue avec les scientifiques sur des problématiques de société.

    Lille – Nord Europe  : Chercheurs itinérants

    Les scientifiques du centre de Lille interviendront dans les établissements scolaires (collèges et lycées) de la Métropole lilloise, du lundi 05 au vendredi 16 octobre 2015. Au programme : réalité virtuelle, programmation objet, imagerie de synthèse, intelligence artificielle… un partage de connaissances sur des sujets qui les passionnent et enrichissent d’ores et déjà notre quotidien.Une manière pour nos chercheurs de communiquer sur leur métier, leurs thématiques et d’échanger avec des élèves afin d’enrichir leur perception de la recherche. Un partage de connaissances sur des sujets passionnants qui enrichissent notre quotidien.

    Nancy – Grand Est  : Artem fête la science

    Scientifiques et médiateurs du centre vous donnent rendez-vous sur le site d’Artem les 9 et 10 octobre prochain, pour une approche plurielle de la science, où informatique rimera avec ludique !  Au programme : robots humanoïdes, informatique sans ordinateur, jeu de société, reconnaissance d’images, envolées de drones, numérique et santé,… Manifestation co-organisée par Mines Nancy, le LORIA, l’Institut Jean Lamour et GeoRessources, avec le soutien d’Inria Nancy – Grand Est.

    Paris – Rocquencourt  : L’eau, future énergie verte ?

    Le centre Paris – Rocquencourt s’associe à la fête de la science Sorbonne Universités qui souhaite mettre en avant cette année le travail des scientifiques qui étudient le climat sous tous ses aspects. Du 9 au 11 octobre, l’équipe Ange du centre vous dira tout sur la dynamique des vagues, la houle, les énergies alternatives et vous propose une conférence sur le thème : Nouvelles vagues, de la simulation numérique à la conception.

    Rennes – Bretagne Atlantique  : Programme ton robot !

    Le centre Inria Rennes – Bretagne Atlantique sera présent au Village des sciences de Rennes du vendredi 9 au dimanche 11 octobre 2015, au Diapason sur le Campus Universitaire de Beaulieu. A cette occasion, nos scientifiques vous proposeront de créer un programme sur ordinateur puis de le tester sur un robot. Plusieurs épreuves ou défis seront proposés selon trois niveaux de difficulté permettant une acquisition progressive du langage de programmation.

    Saclay – Ile de France  : Parcours ludique à la découverte des sciences du numérique

    Le centre de recherche Inria Saclay – Ile-de-France ouvre ses portes vendredi 9 et samedi 10 octobre et invite petits et grands à la découverte des sciences du numérique au travers d’animations ludiques reflétant l’interaction entre l’informatique, les mathématiques et les autres sciences. Au programme, plusieurs ateliers animés par les chercheurs du centre : découverte des secrets de la cryptographie, bio-informatique ludique, initiation aux bases de données, introduction à la programmation et aux robots, exploration du cerveau, et plongée au cœur d’un réseau.

    Sophia Antipolis – Méditerranée  : Explorez les sciences du numérique ! 

    Les scientifiques et médiateurs du centre invitent tous les publics, petits et grands  à venir découvrir les sciences du numérique au travers d’approches concrètes et ludiques. Une programmation riche et variée vous attend à Antibes Juan-Les-Pins, Montpellier et La Seyne sur Mer les 10 et 11 octobre ainsi qu’ à Vinon-sur-Verdon le 17 octobre. Au programme : Maths de la planète Terre, traitement d’images, graphes et algorithmes, manipulations, coding goûters, initiation à la robotique, jeux de société, activités débranchées, tours de magie… Du 5 au 9 octobre, les scientifiques d’Inria interviendront également dans des lycées, un moment privilégié pour dialoguer avec les jeunes et débattre sur des thématiques ciblées, mais aussi pour parler de leur métier de scientifique tel qu’ils le vivent. Enfin nos chercheurs interviendront également dans les médiathèques de la communauté d’agglomération de Sophia Antipolis.

    Nous vous souhaitons une belle semaine festive et scientifique ! Vous pouvez d’ailleurs partager vos découvertes sur Twitter en suivant le compte @FeteScience et son mot-dièse #FDS2015 ou sur Facebook.

    Marie-Agnès Enard

  • Tous les chercheurs skient sur les pistes de tennis

    Ce n’est pas la première et probablement pas la dernière fois que les chercheurs se font insulter ou humilier dans les médias. Mais cet exemple a quelque chose de particulier : il concentre le pire en moins de 30 secondes essayons de décrypter.

    Citation vidéo de C dans l'air 25 septembre 2015
    Cliquer sur l’image pour avoir la citation vidéo de C dans l’air 25 septembre 2015

    Voici le propos: « La recherche, juste la recherche, quand … moi qui suis [de Grenoble], il y a des centres de recherche énormes et avec des gens qui étaient nommés à vie, comment voulez vous qu’on cherche et surtout qu’on trouve pendant toute une vie, quand ils arrivent à 25 ans, 28 ans. ils sont plein d’ardeur et puis après ils vont sur les pistes de ski et dans les clubs de tennis, à Grenoble c’était comme ça, c’était tous les chercheurs qui étaient là, bien évidemment, ils sont nommés à vie, c’est terrible ça n’a pas de sens, donc y’a vraiment des domaines où on peut engager des réformes. » C dans l’air, H. Pilichowski, 25 septembre 2015.

    Du journalisme du lieu commun et de la stigmatisation.

    On ne prendra même pas la peine de se demander ce que la personne qui parle faisait dans les « clubs de ski » pour pouvoir constater que «tous les chercheurs» étaient là, ni quelles sont ses sources, ou les données qui étayent ses affirmations. Nous sommes dans le journalisme du lieu commun. Et ce qui est dans l’air en l’occurrence a l’odeur d’une flatulence.
    Le chroniqueur a ceci de bien qu’il remplace le journalisme du radio-trottoir : plus besoin de prendre une caméra pour aller manipuler la parole du peuple de la rue en lui faisant dire en quelques secondes le lieu commun qui va faire de l’audience, le chroniqueur -dans cet exemple- le remplace haut la main.
    On est forcément le métèque de quelqu’un. Et on peut saluer le fait cette attaque est tellement loin de la réalité qu’elle peine à être crédible.

    Mais il y a pire.

    Voleurs ! De notre liberté d’expression.

    Nous sommes dans un pays libre, y compris de dire le faux. Et c’est bien. Puissions-nous ne jamais perdre ce droit fondamental.
    Mais disposons-nous pleinement de notre liberté d’expression ? Nous avons la liberté de dire, certes, mais moins celle d’être entendu. Cela est vrai pour les scientifiques, mais aussi pour chacune et chacun.

    Les journalistes ne se sont-ils pas accaparés notre liberté d’expression, parlant à notre place ? Le temps de parole des personnes de la société dans les médias diminuent, et des porte-parole se sont installés qui disposent de notre droit à être écouté.

    Ainsi [un certain] journalisme scientifique se sent souvent obligé de faire de l’exceptionnel, de surfer d’effet d’annonce en effet d’annonce (on a eu le dépassement de la vitesse de la lumière, les robots qui vont dominer le monde, récemment les spermatozoïdes artificiels), pour mieux démentir ensuite (ah ben oui, il ne faisait que son métier de journaliste, il a juste dit «peut-être»). Nous aimerions entendre un peu plus les scientifiques eux-mêmes parler de leur métier, de leur recherches, de leurs passions [en collaboration avec les vrais journalistes scientifiques PROPOS CORRECTIF RAJOUTÉ le 02/10/2015].

    Rendre la parole scientifique aux chercheurs.

    Ils sont un peu moins médiatiques à écouter, mais ils partagent des grains de science qui augmentera le niveau de culture scientifique de toutes et tous dans notre société.

    Au delà de http://www.scilogs.fr , il y a des sites où s’expriment des chercheuses et des chercheurs. Voici quelques suggestions pour les sciences du numérique. 

    logo-interstices Interstices ? La revue de culture scientifique en ligne qui invite à explorer les sciences du numérique, à comprendre ses notions fondamentales, à mesurer ses enjeux pour la société, à rencontrer ses acteurs.
     logo-binaire Binaire ? Le blog du monde.fr qui parle de l’informatique, de ses réussites, de son enseignement, de ses métiers, de ses risques, des cultures et des mondes numériques.
    logo-1204 1024 ? Une revue pour les professionnels du monde de l’enseignement, de la recherche et de l’industrie de l’informatique qui permet de découvrir les différentes facettes de cette science.

    Et laissons ce genre de chroniqueurs aller voir sur les « pistes de tennis » qui est vraiment en train de glander.

    Et on aime aussi beaucoup rire de nous même.

    Mais c’est un vrai métier, alors laissons le mot de la fin à un véritable artiste .

    Les Chercheurs, Patrick Timsit, citation vidéo (photo wikipédia) : cliquer sur l’image pour voir la vidéo.

    Thierry Viéville, et un précieux travail de relecture de @chtruchet.

  • Bientôt un commissariat à la souveraineté numérique ?

    En juin dernier, Pierre Bellanger intervenait dans le cadre du café techno de l’association Inria Alumni. L’occasion pour Binaire de discuter avec le fondateur et PDG de Skyrock autour de son ouvrage La souveraineté numérique paru l’année dernière chez Stock.

    « La mondialisation a dévasté nos classes populaires. L’Internet va dévorer nos classes moyennes. » 
    « La grande dépression que nous connaissons depuis cinq ans n’est qu’un modeste épisode en comparaison du cataclysme qui s’annonce. La France et l’Europe n’ont aucune maîtrise sur cette révolution. L’Internet et ses services sont contrôlés par les Américains. L’Internet siphonne nos emplois, nos données, nos vies privées, notre propriété intellectuelle, notre prospérité, notre fiscalité, notre souveraineté. Nous allons donc subir ce bouleversement qui mettra un terme à notre modèle social et économique. Y a-t-il pour nous une alternative ? Oui. » Pierre Bellanger

    Pierre Bellanger, Café techno Inria Alumni, juin 2015, © Marie Jung
    Pierre Bellanger, Café techno Inria Alumni, juin 2015, © Marie Jung

    Internet est né comme espace de liberté. Et puis cette liberté s’est rétrécie sous la pression d’entreprises pour lesquelles Internet est avant tout un business. Internet est en train de modifier notre société en profondeur, et est devenu en cela un sujet politique. L’analyse de Pierre Bellanger est bien documentée, brillante, très partagée sans doute.  Sa réponse autour de la « souveraineté numérique » est plus originale, plus discutable. Avec un Web par nature universel, dans un monde qu’on dit de plus en plus mondialisé, Pierre Bellanger propose des solutions qui peuvent paraître datées comme un Commissariat national ou une grande Agence nationale. Mais, il pose des questions, il propose une vraie réflexion sur des problèmes qui semblent dépasser nos décideurs. Discutons des problèmes et de ses propositions !

    Le patron de Skyrock part d’un constat simple : le numérique est en train de bouleverser de nombreux secteurs (des taxis à la grande distribution) et la société civile tout comme nos élus ont du mal à s’y adapter, voire à y répondre. « Il y a déjà eu par le passé, une révolution technique scientifique fondamentale qui a bouleversé les populations civiles : celle de l’atome. A l’époque, la position de la France était intéressante. Nous avons décidé qu’il nous fallait une souveraineté atomique et nous avons créé un commissariat à l’énergie atomique » avance le patron de Skyrock. Selon lui, un commissariat à l’économie numérique serait le bienvenu pour favoriser l’émergence d’un écosystème numérique national.

    Au delà des structures étatiques, il faudrait comprendre de quels moyens on dispose. Que fait le gouvernement actuel ? Il encourage la création d’un écosystème de startups. Selon Pierre Bellanger, les actions actuelles seraient trop sectorielles, et mettraient trop en avant ces startups. « Pour moi, les startups ne sont pas une réponse. Comme si, dans le secteur automobile, on axait sa stratégie sur la carrosserie et l’équipement au lieu de s’intéresser au moteur. Dans le numérique, on lâche petit à petit les secteurs menacés, en pensant à chaque fois, qu’on s’en sortira bien soi-même. »

    Mais c’est quoi le moteur ? On aimerait comprendre comment on crée une telle stratégie. Pierre Bellanger donne sa réponse. Il en appelle à la souveraineté numérique pour reprendre la maîtrise de notre destin sur les réseaux numérique. « Ce qui définit notre liberté, c’est le droit. Et ce qui garantit le droit, c’est la souveraineté » explique-t-il. Mais qui dit souveraineté numérique dit territoire et frontières. Des frontières sur Internet ? « Le chiffrement pourrait servir de frontière, en nous autorisant à choisir ce que les autres ne peuvent déchiffrer qu’avec notre accord. A l’heure actuelle, dès que des données de citoyens européens arrivent aux US, elles ne sont pas protégées par le droit européen ni américain. Cette absence de droit pourrait être palliée avec le chiffrement. Une donnée chiffrée serait toujours sous souveraineté européenne où qu’elle se trouve » décrit Pierre Bellanger.

    En plus du chiffrement, Pierre Bellanger avance l’idée d’un système d’exploitation souverain. Cet OS souverain aiderait à mettre de l’ordre dans le code. « Refaire Google, ce n’est pas une solution. Il faut avoir un OS qui soit un socle et que tout un écosystème se mettent en mouvement au dessus, en commençant par exemple par faire passer la carte vitale sur cet OS » explique Pierre Bellanger.

    Le cœur de toute cette industrie du numérique sur Internet, c’est la donnée personnelle que les grandes plateformes récupèrent et stockent massivement. L’un des problèmes vient donc de la définition et de la portée des données personnelles. Quand un individu donne accès à son carnet d’adresse, il fournit des informations sur lui-même, mais aussi sur d’autres sans que ces autres en soient informés et bien sûr sans qu’ils aient donné leur autorisation. Pour Pierre Bellanger, le statut juridique de ces données devrait être redéfini en prenant en compte cette particularité. On sent bien que le contrôle des données personnels est un véritable sujet, les plateformes hésitant entre deux tendances qu’elles utilisent selon leurs intérêts du moment : ces données n’appartiennent à personne et les plateformes peuvent donc s’en saisir, ou ces données appartiennent à l’utilisateur qui peut donc leur en céder la jouissance. Pierre Bellanger écarte ces deux écueils en prônant le fait que ces données appartiennent à toutes les personnes qu’elles concernent et que donc personne ne peut se les accaparer ou en céder la jouissance.

    Pierre Bellanger imagine une agence des données, proche de la Cnil, pour contrôler ce qu’on fait des données. Pour gérer chiffrement et OS, il verrait bien la création de quelques organismes chargés d’épauler le commissariat au numérique. Une cour des codes similaire à la cour des comptes. Une agence transversale pour s’occuper de l’OS souverain. Et la justice pour gérer les identités des personnes.

    Si Pierre Bellanger tente d’exploiter son statut d’homme des médias pour faire passer ces idées aux élus et dirigeants d’entreprise, il bute trop souvent contre l’absence de culture numérique de ceux-ci et contre leur « logique provinciale » selon ses mots. « Ils ont décidé de ne pas être le centre de gravité, d’être une province des Etats-Unis. Nous sommes dans la logique du « c’est fait aux Etats-Unis, donc c’est bien » ». A coup de Commissariat, et d’Agences, il propose d’organiser tout cela autour de l’ambition de la souveraineté nationale. Qui veut le suivre dans cette direction qui revient peut être au goût du jour ?

    Serge Abiteboul et Marie Jung

    Pour aller plus loin avec Pierre Bellanger

    • Pierre Bellanger, Principes et pratiques des données personnelles, Contribution à l’étude 2014 du Conseil d’État : Technologies numériques et libertés et droits fondamentaux.
    • Pierre Bellanger, La souveraineté numérique, Stock, 2014.

     

  • Bravo Véronique !

    Le prix Jeune Chercheu-r-se Inria – Académie des Sciences, a été décerné cette année à Véronique Cortier, Directrice de Recherche du CNRS à Nancy. Véronique est une amie de Binaire qui a déjà écrit plusieurs articles pour nous. Ses recherches portent sur la vérification automatique de programmes, notamment l’analyse des protocoles de sécurité. Nous avons demandé à une autre spécialiste de ce domaine, Stéphanie Delaune, de nous parler du parcours de cette chercheuse brillante qui, partie des mathématiques, et, malgré quelques réticences, a fini par être séduite par l’informatique. Serge Abiteboul.

    ©
    Véronique Cortier

    Les protocoles cryptographiques sont des petits programmes destinés à sécuriser nos communications. Sans même nous en apercevoir, nous les utilisons tous les jours pour effectuer des tâches plus ou moins critiques. Ils sont utilisés par exemple pour garantir la confidentialité de nos données bancaires lors d’un achat en ligne, ou encore le respect de notre anonymat lors d’une procédure de vote électronique. J’en profite d’ailleurs pour vous inviter à consulter sur ce blog la série d’articles rédigés par Véronique autour du vote électronique (voir en fin d’article).

    L’utilisation de ces protocoles est en général indolore, mais un protocole mal conçu peut avoir des conséquences désastreuses. Une faille dans un protocole peut permettre à un agent malveillant d’effectuer des opérations frauduleuses sur votre compte bancaire ou de truquer les résultats d’une élection. Indolore… pas tant que ça !

    Afin de pouvoir garantir en amont qu’un protocole particulier satisfait les propriétés de sécurité souhaitées, il est important de les vérifier. Le but des recherches menées par Véronique, et par les chercheurs de son équipe, consiste à développer des techniques d’analyse rigoureuses, et si possible automatiques, pour assurer le bon fonctionnement de ces protocoles de sécurité. Pour cela, il faut traduire protocoles et propriétés de sécurité en formules mathématiques, et développer des méthodes permettant de les analyser.

    Véronique Cortier s’est intéressée, dès son plus jeune âge, aux mathématiques. Elle rejoint l’École Normale Supérieure de Cachan en 1997. Elle avait alors une piètre opinion de l’informatique, qui consistait pour elle principalement à modifier les fichiers de configuration de Windows. Grâce à des professeurs comme Antoine Petit et Hubert Comon-Lundh, elle découvre une discipline fascinante, pleine de problèmes d’actualité, et où les mathématiques jouent un rôle beaucoup plus grand qu’elle ne l’imaginait, un terrain de jeu idéal pour cette passionnée de sciences !

    L’informatique se conjugue aussi brillamment au féminin !

    Stéphanie Delaune CNRS, ENS Cachan

    Pour aller plus loin, relire les articles de Véronique Cortier sur Binaire :

    Et un article de Stéphanie Delaune :

    Retrouvez tous les lauréats 2015 des Prix Inria – Académie des sciences

  • Code Week 2015, ça roule !

    Plusieurs initiatives aident à comprendre les fondements de l’informatique. Le Castor Informatique pour les élèves, l’heure du code pour les jeunes de tous âges, et l’initiative européenne de la semaine du code, juste après la Fête de la Science qui fêtera aussi la Science Informatique.

    logo-codeweekOn repart donc pour une semaine de festivités autour de l’initiation à la programmation, de concert avec tous les autres pays européens, du 10 au 18 octobre 2015. C’est l’occasion de permettre à chacune et chacun, de ma garagiste à mon fleuriste, de comprendre cette informatique qui a généré notre monde numérique. Le comprendre ? Oui, de manière concrète : on s’amuse a créer un petit objet numérique en le programmant pour expérimenter et s’approprier les notions plus abstraites de cette nouvelle science. Et on devient ainsi une personne éclairée sur ces sujets.

    Bienvenue à toutes les bonnes volontés en lien avec Rendez-vous sur le site Code Week France et sur la mailing-liste grâce à ce formulaire. Les hashtags à suivre serontles suivants : #codeweek2015 #codeFR.

    Thierry Viéville.

  • La révolution informatique dans les sciences

    Quand Gérard Berry nous expliquait «pourquoi et comment le monde était devenu numérique» [1] il réfléchissait déjà au fait que nos sciences aussi sont devenues numériques. Quelques années plus tard, venons partager sa pensée sur ces sujets.

    Café techno : Inria Alumni, en partenariat avec NUMA et le blog binaire, vous invite à débattre avec Gérard Berry, professeur au Collège de France le 24 septembre 2015 de 18:30 – 20:30. Plutôt pour les parisiens.

    NUMA Sentier, 39 rue du Caire, 75002 Paris
    NUMA Sentier, 39 rue du Caire, 75002 Paris

    Après avoir utilisé l’informatique comme simple moyen de calcul, les sciences les plus variées découvrent maintenant qu’elle offre une nouvelle façon de raisonner et d’agir. Quelques exemples en astronomie et physique, mais aussi dans des sciences traditionnellement peu mathématisées comme la biologie et la médecine.

    Pour vous inscrire : numa

    Serge Abiteboul.

    [1] Pourquoi et comment le monde est devenu numérique, Gérard Berry, leçon inaugurale au collège de France, 2007

  • Femmes et numérique, y a-t-il un bug ?

    @Maev59
    @Maev59

    « Le numérique a connu et provoqué des mutations majeures dans notre société, mais l’évolution des mentalités à l’égard des femmes se fait attendre ».

    Pour en débattre, la Cité des Sciences organise, en partenariat avec le magazine Pour la Science et le Centre Hubertine Auclert, une table ronde le vendredi 16 octobre 2015 à 18h00 à la Cité des Sciences.

     

    Des personnalités d’horizons divers sont attendues pour évoquer ce sujet :

    • Fanny Lignon, maîtresse de conférences, cinéma audiovisuel à l’université Claude Bernard Lyon 1 ;
    • Antoine Petit, informaticien, président-directeur général de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) ;
    • Pascale Vicat-Blanc, informaticienne, directrice senior Cloud Architecture chez F5 Networks, prix Irène Joliot-Curie en 2011 ;
    • Angela Washko, artiste et activiste américaine.

    Pour en savoir plus : Femmes et numérique, y a-t-il un bug ?

    Marie-Agnès Enard

  • La fable de l’écolier, de l’hôtelier et de l’informaticien,

    GillesDowekUne interview de Gilles Dowek, auteur de la rubrique Homo sapiens informaticus dans Pour la Science.

    Dans le numéro de Pour la Science de septembre, qui sort ce 19 août, la chronique Homo sapiens informaticus nous parle d’écoliers, d’hôteliers et d’informaticiens. Quelle est l’origine de cette chronique ?

    G.D. L’idée de cette chronique m’est venue en lisant, dans la presse, à la fois des articles hostiles à l’enseignement de l’informatique, selon lesquels il est aussi utile de savoir programmer que de savoir changer les segments de pistons du moteur de sa voiture, et d’autres consacrés à l’inquiétude des chefs d’entreprises français, qui commencent à prendre conscience du risque d’être pris de vitesse par les plateformes de commerce en ligne, telles booking, airbnb, amazon, uber, … La relation entre les deux est frappante : d’un côté on continue de penser que les tâches techniques peuvent être déléguées à des techniciens, de l’autre on prend conscience que ces techniciens sont en train de prendre le pouvoir. Je voulais souligner que c’est précisément parce que les hôteliers, les libraires, les taxis, … ne comprennent pas ce qu’est un programme, qu’ils se laissent déposséder.

    … oui de la presse quotidienne [1] au rapport du CNNum [2, page 87] le constat est unanime !

    Comme les hôteliers auraient-ils pu se prémunir de ces informaticiens ?

    G.D. C’est une fausse bonne idée de penser que le développement de logiciels peut se sous-traiter. Car contrairement aux mécaniciens qui, en général, changent les segments de pistons des moteurs des voitures de leurs clients, puis leur rendent ces voitures, les informaticiens exploitent souvent eux-même les objets qu’ils construisent. Les hôteliers auraient donc dû apprendre suffisamment d’informatique, sinon pour construire eux-même un site de réservation en ligne, au moins pour comprendre comment un tel site est construit et comment il permet d’échanger des informations avec ses clients. Ils auraient ainsi pu être les premiers à développer de tels sites et être les acteurs de la transformation de leur métier, au lieu d’en être les victimes.

    oui oui c’est justement ce que la chronique explique plus en détails !

    Et au delà de cette fable, que trouve-t-on au fil des numéros dans la chronique Homo sapiens informaticus ?

    J’essaie de montrer comment l’informatique change différents aspects de nos vies : le savoir, la pensée, l’écriture, l’école, le travail, l’économie, le corps, la mort, les institutions, …

    Et pourquoi ce nom de Homo sapiens informaticus ?

    Les historiens attirent notre attention sur le fait que chacune des révolutions techniques de la préhistoire – la pierre taillée, la pierre polie, l’agriculture, la céramique, la métallurgie, l’écriture, … – a complètement transformé l’humanité. Certains philosophes contemporains – notamment Michel Serres et, après lui, Michel Puech – nous montrent que cela s’applique aussi aux révolutions techniques plus récentes. En partant d’exemples concrets, j’essaie de comprendre, chronique après chronique, qui est homo sapiens informaticus et en quoi il diffère de son lointain ancêtre : l’homme du XXe siècle.

  • Vous savez quoi ? « Girls Can Code! »

    ÉducationTu ne seras pas forcément informaticienne, ma fille, mais la programmation informatique sera un sujet que tu maîtriseras dans ce monde devenu numérique : vazy !

    C’est un stage gratuit pour apprendre à coder, comprendre les bases de l’informatique, et rencontrer d’autres personnes motivées à ne pas uniquement consommer, mais aussi co-construire le monde numérique. Un stage de programmation entre collégiennes et lycéennes du 24 au 29 août à Paris. Grâce à France-IOI et Prologin.

    Et quelqu’un (un mec, sûrement) va dire «mais pourquoi devraient-« elles´´ avoir un traitement particulier ?» … n’est ce pas l’aveu d’une dissymétrie ? Oui : une dissymétrie de la société [1].  Et dès qu’on se donne les moyens de ne pas créer cette dissymétrie, comme dans le cadre du concours Castor Informatique (avec 46% de filles), ou d’aider à la corriger [2] comme le fait cette initiative, alors les choses bougent.

    Concrètement: Il est encore temps de s’inscrire: il suffit de remplir le formulaire sur gcc.prologin.org avant le 1er août. Le stage est entièrement gratuit et ouvert à toute fille née en 1995 ou après et qui n’est pas encore détentrice du baccalauréat.L’organisation prend en charge la restauration et l’hébergement à l’hôtel, mais pas les frais de transport jusqu’au lieu de stage. D’ici le stage, il est utile de se créer un compte sur France-ioi et se laisser guider par les exercices.

    Serge Abiteboul et Thierry Viéville.

    [1] Collet, Isabelle (2011). Effet de genre, le paradoxe des études d’informatique, TIC & Société, [En ligne], 5(1)

    [2] Le MOOC Égalité Femmes-Hommes pour aider à comprendre et faire changer les choses à ce sujet

    Note: Binaire essaie de ne pas sombrer dans le monde très masculin des sciences en ouvrant ses articles à un grand nombre d’amies. Au delà la journée des droits de la femme (Bonne fête des Meufes !, L’informatique: pour nous, les femmes!), on s’y interroge sur ce sujet (Où sont les femmes ?, Barbie est moins conne qu’on le dit) et parle bien volontiers de (Et un, et deux, et trois femmes Prix Turing !La pétulante Grace HopperLa visionnaire Ada Lovelace).

     

  • Contre les robots tueurs

    Les progrès de la robotique et de l’intelligence artificielle sont sur le point de permettre la construction d’armes autonomes pour chercher et éliminer des cibles humaines. Ce serait une révolution dans l’industrie de l’armement : actuellement, même les drones sont commandés à distance. Jusqu’à présent, les robots sont des exécutants mais les décisions restent entre les mains d’un être humain qui prend, ou non, la décision de tuer. Cela pourrait changer, car la technologie va désormais donner la capacité de déployer des armes entièrement autonomes, et il ne faut pas beaucoup d’imagination pour s’inquiéter de la course aux armements qui s’en suivra et des risques afférents.

    À l’occasion du grand congrès annuel de l’intelligence artificielle, IJCAI, les chercheurs en robotique et intelligence artificielle du monde entier se mobilisent contre ce développement et ont lancé une pétition réclamant l’interdiction d’armes autonomes.

    Même en vacances, binaire soutient cette pétition, qui est accessible à
    http://futureoflife.org/AI/open_letter_autonomous_weapons

    Claire Mathieu

     

  • Carte à puce. Une histoire à rebonds

    Expo, Musée des Arts et Métiers
    Exposition, Musée des Arts et Métiers

    C’est une expo, petite mais sympathique, qui raconte 40 ans de la carte à puce, de la carte de téléphone, à la carte SIM, à la carte de paiement, à la carte santé. Des milliards de telles cartes sont fabriquées chaque année.

    Le commissaire scientifique de l’exposition est Pierre Paradinas, un des éditeurs de Binaire. Il est professeur titulaire de la chaire « Systèmes Embarqués » au Cnam. Il a notamment dirigé le laboratoire de recherche de Gemplus, un des industriels clés de l’histoire de la carte à puce.

    Surtout ne pas rater le film de 5mn « Michel et la cryptographie » des Chevreaux Suprématistes. Un petit bonheur de drôlerie.

    Serge Abiteboul

    Maquette de terminal de paiement, Roland Moreno, vers 1975. (Les filles de R.M. s'en sont servies pour jouer à la marchande.)
    Maquette de terminal de paiement, Roland Moreno, vers 1975. (Les filles de R.M. s’en sont servies pour jouer à la marchande.)
  • Belles histoires du numérique à la française

    « Chercheurs et entrepreneurs : c’est possible ! Belles histoires du numérique à la française ».  Dialogue à partir du livre de Antoine Petit (président d’Inria, l’institut national de recherche français dédié aux sciences du numérique) et Laurent Kott (président d’IT Translation, investisseur et cofondateur de startups techno-numériques issues de la recherche publique ou privée), chez Manitoba / Les Belles Lettres. 2015.

    Petit-Kott-2015Serge Abiteboul : C’est clair, les auteurs savent de quoi ils parlent. Le livre raconte des startups technologiques, de très belles histoires comme celles d’Ilog, Vulog, ou O2-technology. Il fourmille d’informations sur la création de ces entreprises, sur leur croissance. Mais…

    Thierry Viéville : Mais tu n’as pas l’air très enthousiaste ?

    Serge : C’est un sujet passionnant. Alors, pourquoi je boude mon plaisir ? Pour moi, une telle entreprise est  la rencontre entre un rêve de chercheur, et un projet d’entreprise. Le livre dit beaucoup sur le projet et pas grand chose sur le rêve. On en apprend finalement assez peu sur les développements techniques et scientifiques qui ont conduit à des produits qu’on a vendu.

    Thierry : Tu en demandes peut-être trop. C’est juste un livre qui donne plein d’informations sur la création de startups Inria. Je suis plutôt fier quand les travaux de recherche fondamentale des collègues participent au développement de l’économie, à la création d’emplois.

    Un métier à tisser de Joseph-Marie Jacquard. Cette machine du début du 19ème héritera des innovations mentionnées ici. ©wikipédia

    Voici un exemple que j’aime bien ; c’est en France, à Lyon, c’est au milieu du 18ème siècle, et c’est déjà de l’informatique. Des inventeurs ont apporté la prospérité à tout un éco-système  [ref1] avec l’idée de la « technologie ouverte » comme levier. Pour son invention d’une machine à tisser les fils de soie, Michel Berthet a reçu une récompense qui impliquait de transférer cette technologie aux autres fabricants. La « gestion publique de l’innovation, fondée sur la négociation partagée de l’utilité technique et la diffusion rapide des techniques nouvelles » va permettre de devancer les concurrents européens en proposant plus de 200 propositions d’améliorations [ref2].

    Cette avancée collective va conduire à implémenter une notion rudimentaire de programme avec un système de cartes perforées portées par un prisme dû à  Jean-Baptiste Falcon , et à une première tentative de machine pour robotiser les métiers à tisser, grâce à Jacques Vaucanson. Les concepts fondateurs de la science informatique sont déjà là. On retrouve  l’idée fondamentale du codage de l’information. Ici l’information, ce sont les motifs à tisser devenus trop complexes pour être créés manuellement. On trouve même le traitement automatisé ; on parlera plus tard d’algorithme. 

    Serge : C’est un bel exemple. Les histoires d’entreprises de chercheur-e-s/entrepreneur-e-s peuvent être très belles.

    Thierry : Et ta conclusion sur le livre d’Antoine Petit et Laurent Kott ?

    Serge : De belles histoires de startups Inria restent à mon avis encore à écrire. Faire partager l’aventure de ces créations et mettre en lumière ces hommes et femmes qui innovent, c’est aussi ce que nous avons envie de partager, à Binaire, avec le récit de startups d’aujourd’hui. Et pour finir, juste un détail : pourquoi un tel livre n’existe-t-il pas en version numérique ?

    [ref1]: The economics of open technology: collective organization and individual claims in the “ fabrique lyonnaise ” during the old regime. Dominique Foray and Liliane Hilaire Perez, Conference in honor of Paul A.David, Turin (Italy), 2000, voir aussi wikipédia.

    [ref2] : Liliane Hilaire-Pérez, L’invention technique au siècle des Lumières, Albin Michel, 2000

     

  • Lire, compter, coder…

    Une excellente émission à podcaster sur l’enseignement de l’informatique. La question est souvent posée sur les antennes mais les vrais sujets sont rarement abordés comme ils le sont ici. Enfin, une vision réaliste, optimiste sans cacher les problèmes lourds ! Un discours positif qui reconnait les vraies avancées, un discours positif sur les profs des écoles, collèges et lycée, en accord avec ce que je connais, et qui fait plaisir à entendre. Serge Abiteboul.

    Du grain à moudre : Lire, compter, coder… bientôt le triptyque de la rentrée scolaire?
    avec

    • Sophie Pène, Professeur à l’Université Paris Descartes, membre du Conseil National du numérique,
    • Gilles Dowek, mathématicien, logicien et informaticien, chercheur et directeur de recherche à Inria,
    • Stéphie Vincent, Directrice association CoDEV « Accroître par le numérique le pouvoir d’agir »
  • Podcast : L’apprentissage automatique : quand les machines apprennent

    Toujours dans le cadre de ICML (International Conference on Machine Learning) qui se passe à Lille du 6 au 11 juillet, Binaire a réuni à Nantes trois chercheurs pour qu’ils nous parlent d’apprentissage automatique :

    • Colin de la Higuera, professeur en informatique, directeur adjoint du Lina, Laboratoire d’Informatique Nantes Atlantique. éditeur du blog binaire,
    • Yannick Aoustin, chercheur en robotique à l’IRCCyN, l’Institut de Recherche en Communication et Cybernétique de Nantes, et
    • Jeff Abrahamson, ancien de Google Londres, co-fondateur de Jellybooks.
    Podcast : Binaire et le labo des savoirs
    Podcast : Quand les machines apprennent

    bandeau-playerUne émission organisée par binaire en partenariat avec le Labo des savoirs, et animée par Guillaume Mézières, avec à la technique, Claire Sizorn.

  • Le MOOC Égalité Femmes-Hommes

    Rares sont ceux qui se disent adversaires de l’égalité entre les sexes. Mais la réalité est différente. C’est bien pour cela que la première formation en ligne, dédiée à l’égalité femmes-hommes, lancée ce mois-ci, est importante. Nous l’avons testée et comme nous l’avons trouvée intéressante, nous avons demandé à Nathalie Van de Wiele, qui est à son origine, de nous en parler. Serge Abiteboul et Thierry Viéville.

    flot_egaliteFHLes FLOT (Formations en Ligne Ouvertes à Tous), acronyme français de MOOC (Massive Open Online Courses), sont appelés à jouer un rôle important dans notre système de formation universitaire et professionnelle et leur développement mérite d’être suivi avec attention depuis leur apparition il y a environ deux ans.

    Il se trouve que c’est la première fois dans l’histoire des FLOT/MOOC, en France et dans le monde, qu’une formation en ligne libre et gratuite, ouverte à toutes et tous, est dédiée à l’égalité femmes-hommes.

    Développée à l’initiative de l’association SILLAGES.info présidée par la Conférence des grandes écoles, cette formation est le fruit d’un large travail collaboratif impliquant plusieurs associations (Femmes & Sciences, Femmes & Mathématiques, Femmes Ingénieurs, Réussir l’égalité femmes-hommes) ainsi que des personnalités du domaine de l’égalité femmes-hommes.

    Intitulé « Être en responsabilité demain : se former à l’égalité femmes-hommes », ce FLOT traite de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, en abordant l’éducation, les stéréotypes, l’orientation, la parité et la mixité des filières et des métiers, le sexisme ordinaire, le harcèlement et les violences faites aux femmes, pour conclure en terme de responsabilité et vie citoyenne.

    La formation est structurée en 7 séquences représentant chacune 2 heures de travail, soit environ 14 heures de travail à planifier selon les besoins de l’apprenant-e. Une quarantaine de courtes vidéos (archives d’actualités, animations, explication de concepts, etc.) accompagnent la formation. De nombreux tests permettent une auto-évaluation tout au long du parcours.

    On peut commencer cette formation, et la suivre en autonomie, à tout moment de l’année, mais il est conseillé de s’inscrire pour bénéficier d’un forum où partager ses questions et son expérience avec les autres apprenant-e-s et avec l’équipe d’accompagnement. La première session est ouverte jusqu’au 31 juillet 2015.

    Pour aller plus loin :

    Nathalie Van de Wiele

  • Science informatique dites vous ? Deux revues et un blog à votre service.

    Il est important que, des actrices et acteurs … aux utilisateurs et utilisatrices du numérique, nous partagions une culture en sciences du numérique, pour comprendre et maîtriser les technologies qui en sont issues.

    Pour concrétiser ce partage avec le monde de la recherche, la Société Informatique de FranceInria et le CNRS proposent deux revues et un blog : profitons-en !

     

    logo-1204

    1024 ? Une revue pour les professionnelles et les professionnels du monde de l’enseignement, de la recherche et de l’industrie de l’informatique qui permet de découvrir les différentes facettes de cette science.

     

    logo-interstices)I(nterstices ? La revue de culture scientifique en ligne qui invite à explorer les sciences du numérique, à comprendre ses notions fondamentales, à mesurer ses enjeux pour la société, à rencontrer ses acteurs et actrices.

     

    logo-binaireBinaire ? Le blog du monde.fr qui parle de l’informatique, de ses réussites, de son enseignement, de ses métiers, de ses risques, des cultures et des mondes numériques.

     

  • Enseignement de l’informatique pour les humanités et les sciences sociales

    A binaire, nous pensons que l’informatique concerne tout le monde. C’est pourquoi ces journées de la SIF autour de l’enseignement de l’informatique pour les humanités et les sciences sociales nous paraissent particulièrement importantes. Serge Abiteboul, Thierry Vieville.

    logo-sif

    Inscriptions ouvertes !
    23 & 24 juin 2015 à Paris, CNAM
    Enseignement de l’informatique
    pour les humanités et les sciences sociales

    la SIF organise deux journées pédagogiques sur le thème de « L’enseignement de l’informatique pour les humanités et les sciences sociales ».

    Quelques points abordés :

    • État des lieux, en France et à l’étranger
    • Quelle informatique nécessaire aux humanités, sciences sociales ?
    • Approches pédagogiques et didactiques pour enseigner l’informatique aux humanités et sciences sociales
    • Humanités numériques
    • Formation des professeurs des écoles à l’informatique

    Information complémentaire, programme et inscription (gratuite pour les adhérents de la SIF) à partir de la page dédiée à l’événement societe-informatique-de-france.fr/enseignement/j-pedago/j-pedago-2015/

    ou auprès d’Olivier Baudon <olivier . baudon @ labri . fr>.

  • La France s’engage… et nous aussi !

    En juin 2014, le gouvernement a lancé une démarche originale et inédite nommée «La France s’engage» . Elle a vocation à mettre en valeur et faciliter l’extension d’initiatives socialement innovantes, d’intérêt général, portées bénévolement par des individus, des associations, des fondations, des entreprises. Cette initiative est portée par le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.  Parmi tous les projets sélectionnés, celui de Wi-FIlles a retenu tout particulièrement l’attention de Binaire car il s’adresse aux jeunes filles pour les initier aux métiers techniques de l’informatique et du numérique. Engagez-vous qu’ils disaient ! C’est ce que nous comptons faire en vous expliquant ce projet. wifilles-logoWi-FIlles est à ce jour un des seuls programmes en France qui s’adresse aux jeunes filles pour leur faire découvrir, dès la 4ème, les métiers de l’informatique et du numérique de demain. Il est porté par le Club d’entreprises FACE Seine-Saint-Denis (membre de la Fondation Agir Contre l’Exclusion). Claire Etien, sa directrice nous résume son ambition : faire en sorte que les filles ne soient pas mises à l’écart des futurs enjeux économiques de demain.

    « Il est de notre responsabilité à tous de ne pas laisser 50% de l’humanité, les femmes, passer à côté de cet enjeu fondamental : le numérique. »

    La deuxième promotion a vu le jour en février de cette année avec comme objectif revendiqué : atteindre l’égalité Femme – Homme dans le secteur technique de l’informatique. Avec le soutien des institutions publiques et de partenaires privés, WI-FIlles travaille à éduquer, inspirer et équiper les jeunes filles, avec les compétences et les ressources nécessaires, dans un seul but : saisir les opportunités professionnelles dans le domaine technique de l’informatique. « Le constat est éloquent : nous ne formons pas assez d’ingénieurs et les femmes représentent environ 10% des diplômés dans le secteur informatique » nous explique Claire Etien [1].

    LOGO_FACE_RVBLe Club FACE Seine-Saint-Denis a donc décidé de créer ce projet, en co-construction avec des partenaires industriels comme DELL, ERDF et Orange ou académique comme la Région Île-de-France. Concrètement la fondation propose aux filles, via des sensibilisations dans leur établissement scolaire, d’intégrer un parcours de découvertes, de rencontres, d’acquisition de compétences techniques IT. « En bref on leur apprend à coder et à maitriser l’environnement informatique et numérique ! » dixit Claire Etien.

    Ces sensibilisations sont accessibles à toutes les filles de 4ème et de 3ème sans aucun pré-requis scolaires. Elles sont informées du programme non pas par leur environnement familial, comme le sont en règle générale les élèves les plus favorisées, mais par des sensibilisations au sein des établissements scolaires, en présence de leurs parents. À l’issu des sensibilisations, les collégiennes motivées et disponibles, hors temps scolaires, sont invitées à intégrer la promotion WI-FIlles. Un parcours WI-FIlles c’est 20 futures Ambassadrices du Numérique, plus de 180h de formations et de rencontres et de mises en situation.

    À l’issue du parcours, les ambassadrices sont coachées pour organiser un WI-Fille Girls Camp, événement partenaire du Festival Futur en Seine. Ce sont elles qui présentent auprès des partenaires, de leur communauté éducative le fruit de leur travail. Elles sont récompensées par un diplôme remis par les partenaires. L’objectif a long terme est que ces jeunes femmes puissent être les futures ambassadrices pour accompagner de nouvelles recrues et que cette initiative s’étende bien au-delà de la Seine-Saint Denis.

    logoEn participant au challenge « La France s’engage », et après avoir été sélectionné parmi 600 projets, nul doute que le projet Wi-FIlles va faire parler de lui mais surtout d’elles ! Le 22 juin, 15 projets seront lauréats. Ils seront aidés financièrement et accompagnés pour rayonner nationalement. Nous sommes convaincus qu’elles seront récompensées pour leur initiative mais pour leur donner encore plus de chance, nous vous invitons à les encouragez. Rendez-vous sur le site www.lafrancesengage.fr/je-vote , et votez pour Wi-FIlles ! N’hésitez surtout pas à partager autour de vous, elles comptent sur vous !

    Marie-Agnès Enard